En journée, la fille célibataire est à peu près tranquille. Elle peut lire ou barboter relativement en paix. C'est le soir que ça se corse.
Ah, les soirées à Bang Bao (notre village)... un mythe. Chaque soir, c'est un bar différent qui organise une « party ». Pendant la journée, la promotion bat son plein. Des prospectus sont distribués sur la plage, dans la rue et dans les différents « resorts » par des crieurs. Le vacancier est rare, il faut l'appâter et pour cela tous les moyens sont bons: « Live DJ »(je cite...faudra qu'on m'explique comment un DJ peut opérer en différé), free BBQ, free buckets (seaux de cocktail) pendant la happy hour (qu'il ne s'agit pas de louper), half price beer... C'est limite si on ne se fait pas payer pour venir.
Quand la fête est réussie (ce qui arrive à peu près 2 soirs par semaine), c'est la moitié de la population du village(voire de l'île?) qui est réunie dans un lieu, comme l'autre soir au « Himmel », qui n'a d'allemand que le nom.
Pas possible d'admirer tranquillement les prouesses d'artistes locaux.
Je me suis retrouvée cernée, faite comme une ratte, prise en sandwich. A ma gauche, un militaire danois de retour d'Afghanistan. A ma droite, un réparateur d'avions québécois. Le premier attaque franco:« Are 23 years old too young for you? ». Mon pauvre garçon, s'il n'y avait que ton âge... Je suis restée poliment (et lâchement) évasive, me demandant comment j'allais me dépêtrer de cette situation sans être trop blessante. Profitant de mon hésitation, le second tente une autre tactique d'approche inspirée de celle de son adversaire. J'en ai encore des courbatures aux zygomatiques. Tenez-vous bien les côtes, voici un compliment à la québécoise: « tu es encore très jolie, tu ne fais pas ton âge. ». Avec l'accent, c'est encore plus drôle... Moi qui n'avais pas encore de complexes sur mon grand âge, je commence à me poser des questions.
Bref, j'étais servie... Il n'a pas fallu moins de l'intervention d'un mannequin hollandais pour me sauver de cette situation critique.
Ce soir, je voulais être tranquille pour terminer et envoyer tranquillement ce post dans un café... un jeune homme en état d'ébriété vient pour la deuxième fois de me faire des pompes sous le nez. Une entrée en matière qui a l'avantage de l'originalité, comparée au « tu viens boire une bière avec nous quand t'as fini »de 2 Français (là je crois que j'ai pas le choix même si j'ai plongée demain matin aux horreurs, ça fait plus d'une heure qu'ils attendent patiemment sans m'embêter).
Mais faut pas me faire chier quand j'écris.
Sinon, vous connaissez probablement la boxe thaï. Moi, j'ai expérimenté la drague thaï. Un art aussi. Un petit serveur du « resort » a commencé très fort en me dessinant un cœur sur l'addition dès le premier repas. Bon, il ne me plaît pas (ça alors), mais c'est toujours flatteur. Et puis la professeur qui sommeille (hiberne?) en moi tire son chapeau( pas trop longtemps car le soleil tape) devant ses compétences linguistiques.
Il a appris l'anglais tout seul en arrivant ici, il y a 3 ans, avec un livre... et les touristes. Il a l'oreille, le bougre. Il possède également quelques rudiments de français. « Bonjour, je t'aime », m'annonce-t-il dès le deuxième jour. Amusée, je lui demande où il a appris ça. Il me dit « repeat after me » puis une phrase en thaï. J'obtempère (tant bien que mal, enfin plutôt mal que bien) et demande « What does it mean? ». J'aurais dû procéder dans l'ordre inverse... Réponse (en français, SVP) « moi aussi je t'aime ». Il m'a arraché ce qu'on appelle des aveux forcés, le rusé.
Le lendemain au petit dej, il m'a fourré un bébé dans les bras (adorable, au demeurant). Quand je lui ai demandé à qui c'était, il m'a répondu « you and me »...
Après, les choses se sont quelque peu gâtées quand Monsieur a compris que je ne l'aimais pas pour de vrai... Au lieu de mots d'amour, j'ai eu droit à des noms d'oiseaux... en français. Sa prononciation était irréprochable, on ne peut pas lui enlever ça. Je le suspecte d'avoir pris des cours auprès d'un jeune couple de français qui résidait dans le même « resort »que nous.
L'amour que vouaient les moustiques à ma peau tendre, par contre, me paraissait inconditionnel. Tu peux les envoyer paître des millions de fois sans entamer leur ardeur: tu les insultes, leur cries dessus, les tapes (enfin surtout, tu TE tapes), ils semblent aimer ça les cochons puisqu'ils reviennent en puissance quelques secondes plus tard. Certes, j'ai toujours aimé le look sixties (pois, etc), mais j'aime pas quand ça gratte et que ça fait de vilaines croûtes. J'ai fini par trouver leur talon d'Achille: je mange très épicé, comme les locaux (qui eux ne se font pas trop importuner), tout simplement. Tu ne veux pas de tes piments, Anke? Donne à tata Mélanie! Je commande « extra hot »(ce qui surprend toujours les serveurs) et quand ça ne suffit pas (ils prennent vraiment les touristes pour des tapettes) je rajoute une cuillère à soupe de poudre de piment. Une fois le plat terminé, je me transforme en dragon pendant 10 minutes, verse quelques larmes, mais l'objectif est atteint: les moustiques ne m'approchent plus.
Par contre... les fourmis seem to like it hot.
Je capitule.