Ca aura été le scandale politique de la semaine dernière : alors que les plans de rigueur se succèdent en Europe et que la France tente de réformer son système de retraites, on apprenait que la très catholique Christine Boutin touchait 9500 euros mensuels pour un rapport sur les « conséquences sociales de la mondialisation ». Rapport pour lequel lui était mis gracieusement à disposition un secrétariat, des bureaux dans le XVe arrondissement de Paris, des collaborateurs et un chauffeur. Non contente de ces 9500 euros et de ces avantages en nature, Mme Boutin ajoutait à cela sa retraite de parlementaire et une indemnité de conseillère générale des Yvelines…Le tout pour un (coquet) montant de 18000 euros, d’après les calculs du quotidien Le Monde.
On le voit, la rigueur et la décence ne semblent pas faire partie des valeurs chrétiennes que Mme Boutin s’évertue à prêcher.
Ces chiffres allaient déclencher un imbroglio médiatico-politique qui allait durer toute la semaine. La droite eut du mal à accorder ses violons, nous offrant plusieurs chassés-croisés avant de demander à Mme Boutin de faire un geste, tandis que la gauche s’employait à dénoncer les montants en jeu, le caractère discutable de l’étude et le principe de cumul des rémunérations.
Retour sur les épisodes de la semaine.
Mme Boutin, dans un grand numéro de Sainte Vierge effarouchée, à tout d’abord déclaré, suite à la publication de cette information par Le Canard Enchaîné, sur France Info qu’elle n’y pouvait rien, et qu’elle ne renoncerait pas à ses avantages, prétextant sans rire que sa mission était d’une importance extrême : « J’ai une superbe mission, une responsabilité majeure qui va sans doute participer à la pacification mondiale.». Histoire de se donner bonne conscience, de faire taire les mauvaises langues (tel Jean-Marc Ayrault) qui criaient au « rapport bidon », ou d’éloigner le fantôme de Xavière Tibéri ?
Mme Boutin s’est montrée toutefois moins à l’aise, quand en réponse à la question de savoir si elle se considérait comme « privilégiée », elle a répondu assez bizarrement : « Il ne faut pas croire que cet argent n’est pas redistribué. Il finance aussi mon activité politique et une partie va au Parti chrétien démocrate. Moi je n’ai aucun compte en actions. Je ne joue pas en Bourse. ». Vieille défiance du catholicisme envers l’argent et la Bourse, soit, mais on est surpris de voir que Mme Boutin ne conçoive pas que de reverser une partie de ces sommes – provenant d’impôts de contribuables pas forcément tous du même bord qu’elle– à son propre parti n’y change rien. De telles erreurs de raisonnement n’augurent rien de bon pour le futur rapport Boutin.
Puis, sous la pression des réactions, et les retournements de veste à droite – chacun commençant à lâcher la très catholique Christine – Eric Woerth a demandé à cette dernière de réviser les termes de son contrat, et d’entamer son chemin de Croix.
La Boutin a pleuré, la Boutin a prié, la Boutin a (finalement) plié.
Et c’est immaculée de ses bonnes intentions, se présentant en victime expiatoire de la meute, qu’elle est arrivée sur le plateau du 20 Heures de France2 pour annoncer qu’elle réaliserait le travail gratuitement.
La France respirait ! Sainte Boutin continuera donc à servir la République, à titre gracieux, qui plus est – mais que diable, Mme Boutin, Jeanne d’Arc était-elle salariée et multi-pensionnée ?
Le fameux rapport sur les inégalités sociales de la mondialisation sera donc réalisé et présenté lors du G20. On ne doute qu’il impressionne les Obama, Hu, Cameron et autres Merkel auxquels il est destiné et qu’ils y reconnaîtront la main de Dieu !
Car il est vrai que le fait de confier ce rapport à Mme Boutin, qui n’est pas plus experte de la mondialisation que Zahia de la Passion du Christ, pose d’autres questions encore en suspens à ce jour : Pourquoi ne pas l’avoir confié à des services compétents ? Ou bien, faut-il y voir comme le propose le Canard une façon pour Sarkozy de « museler » Mme Boutin, et d’acheter ses voix et sa docilité pour 2012 ?
Mais il est vrai que dans ce sujet comme dans d’autres, les voix du Seigneur sont impénétrables…