Alors que Nicolas Sarkozy déroule le tapis rouge au « Guide de la révolution libyenne » Mu’ammar Khadafi, la presse décerne un carton rouge à l’arrivée en France du leader libyen pour une visite officielle de cinq jours. Fallait-il accueillir Khadafi ? Le débat est sur toutes les lèvres, et il n’est pas certain que la réponse à la question soit simplement un « oui » ou un « non ».
Nicolas Sarkozy est trop fin calculateur de son image, pour ne pas se douter que la visite de Khadafi allait faire déferler tant de critiques dans les médias. L’actuel Président de la République a été élu, faut-il le rappeler, sur le thème de la rupture, et peut-être notamment en l’occurrence rupture sur la politique étrangère. Ni François Mitterrand ni Jacques Chirac, en leurs temps, n’ont accueilli Khadafi. Alors pourquoi ne pas le recevoir aujourd’hui ? Un changement de méthode, fût-elle sujet à critiques, ne peut-il pas faire bouger les lignes ?
J’entends certains qui, s’indignant, pensent qu’il est inadmissible que l’on donne autant d’audience à un dictateur qui a organisé des attentats. Aux nombreux donneurs de leçons, dont je suis parfois, je réponds : oui, Khadafi justifie encore les actes de terrorisme, mais le fait qu’il rentre « dans le rang petit à petit » ne permet-il pas de saisir la balle au bond et de faire autrement ? Aux donneurs de leçons, je demande : Voyage de Khadafi ou pas, comment faire pour lutter contre le terrorisme international ?
Oui, l’arrivée de Khadafi concomitante avec la Journée mondiale des droits de l’homme, a quelque chose de dérangeant. Oui, il est vrai que la diplomatie ne doit pas s’arrêter à des contrats. Oui, comme le rappelait Rama Yade hier dans un entretien au Parisien, « la réintégration du colonel Khadafi passe aussi par le respect des droits de l’homme ». Il n’empêche que le Président a peut-être raison de vouloir dire les choses en face au leader libyen, plutôt que par protestations virulentes idéologiques interposées. Realpolitik à la Sarkozy ?
Fredo