"De Gaulle au bac : l'étrange promotion du général", un débat avec Arrêt sur Images

Publié le 16 juin 2010 par Jcgrellety

"De Gaulle au programme de Lettres du bac L ? Horreur! Formidable! Les réactions sont passionnées et passionnelles. Un collectif de profs de Lettres et le Snes, principal syndicat du secondaire, classé à gauche, sont vent debout contre cette promotion au rang d'écrivain de l'homme du 18 juin. Le Figaro la soutient ardemment. Que cache ce choix ? Qui en est à l’origine ? Et pourquoi la polémique resurgit-elle aujourd'hui, alors que la pétition date de février ? De Gaulle est –il un écrivain? Depuis que le troisième tome de ses Mémoires de guerre (qui porte sur la période 1944-46) est inscrit au programme de lettres de terminale L pour l'année 2010-2011, le débat est relancé. Le Snes, ainsi qu'un collectif de professeurs de lettres, s’opposent à ce choix. L'écrivain Max Gallo, le journaliste Pierre Assouline, au contraire, le défendent. Mais, au-delà du débat lui-même, "l’affaire de Gaulle" suscite quelques interrogations. Car la polémique ne date pas de ces derniers jours. C’est en janvier que sont publiés par circulaire les nouveaux programmes. Quelques jours après, le 5 février, le Snes publie un communiqué, pour en critiquer plusieurs aspects. Un paragraphe concerne le choix de l'ouvrage : le Snes explique s’y opposer, pour des raisons «pédagogiques». Leur critiques portent essentiellement sur les qualités littéraires de l'oeuvre : pourquoi choisir ce livre, alors qu'il en est de plus marquants au XX e siècle? De plus, l'oeuvre semble trop difficile d'accès pour des élèves de 17 ans. En parallèle, un collectif de profs, "Lettres volées", lance une pétition, que ne signe pas le Snes. Leurs arguments sont essentiellement politiques : pour eux , faire étudier un livre de de Gaulle est le résultat d'un parti-pris idéologique. Le Snes, de son côté, assure «ne pas contester des œuvres au nom de leur couleur politique». (...) De Gaulle aurait-il donc été choisi pour des raisons autres que simplement pédagogiques et littéraires ? Qui a choisi, d'ailleurs, de mettre cette œuvre au programme? C’est une commission composée de 5 inspecteurs généraux de l‘Education nationale, qui s’est réunie en novembre dernier. Dans cette commission, Philippe Le Guillou, doyen des inspecteurs de l’Education Nationale, qui est aussi écrivain, et, accessoirement, gaulliste convaincu. Il a d’ailleurs réédité, cette année, aux éditions Gallimard, "Stèles à de Gaulle", un vibrant hommage au général. Une coïncidence que ne manquent pas de souligner les "Lettres volées" et le Snes, qui a publié un billet d’humeur sur le sujet : "La réédition soudaine de ce texte hagiographique conjointement à la publication du programme fait désordre". De son côté, Le Guillou "se défend", dans une interview à l’Humanité, d'être "à l’origine" de ce choix. Mais le justifie malgré tout par «les qualités littéraires de l’oeuvre, et le double anniversaire gaullien: son appel et sa mort."

Il faut dire, par ailleurs, que le Snes ne porte pas le doyen dans son cœur, et que son opposition ne se limite pas au débat sur de Gaulle. Sultan le définit comme «partisan de l’école républicaine, à l’ancienne», à l’opposé du Snes, plutôt proche des "pédagogues", dans le débat qui partage le monde de l’éducation, et qui était le sujet d'une récente émission Ligne Jaune. Autre critique sur le choix du programme de Lettres : la publication des livres au programme de terminale a eu lieu dès janvier, alors, que d'habitude, elle n'est publiée qu'en avril. Sultan juge cette «précipitation étrange». Dernière bizarrerie, selon Tristan Macé, professeur de Lettres et signataire de la pétition "Lettres volées' : aucun enseignant n'a été consulté pour le choix des ouvrages. "Il est d'usage, explique-t-il, que des enseignants de Lettres en terminale soient convoqués par l'inspection générale et se réunissent pour proposer une liste de livres, les inspecteurs généraux choisissent ensuite en fonction de cette liste". Pour la première fois, cette année, ça n'a pas été le cas. Philippe Le Guillou n'a pas répondu à nos sollicitations, s'enfermant (logiquement ?) dans un mutisme...gaullien.Mais sur le fond, que penser des qualités littéraires des Mémoires de guerre ? "Vieil homme, recru d'épreuves, sentant venir le froid éternel"... : nous nous plongerons D@ns le texte du style gaullien, dans la prochaine émission de Judith Bernard, mise en ligne jeudi."

De Gaulle : idolâtrie d'Etat