Ok... Je vous demande indulgence; ce billet, rédigé à 23h - toujours un peu sous le jet lag, quand même, donc avec fatigue, est aussi rédigé après une soirée arrosée de sangria, une délicieuse spécialité espagnole - que j'ai tout de même allongée du reste d'une bouteille de rosé achetée hier. Hum.
Ce soir, je parle d'expérience d'hostel (ou "auberge de jeunesse", comme ces établissements sont connus chez nous, bien que beaucoup de voyageurs jeunes et moins jeunes profitent de ce concept, mes 44 ans en étant une preuve certaine, re-hum).
Il n'y a rien comme un bon hostel pour rencontrer des gens d'un peu partout dans le monde dans une ambiance relax et dépourvue des faux semblants des soirées dans les bars. Tous les voyageurs sont là pour en rencontrer d'autres de manière plus ou moins accentuée, et chacun est libre de se présenter ou non, d'échanger ou non, ou de rester anonyme. Pour ma part, je suis plutôt du genre tranquille, dans mon coin, à s'affairer à ses propres plans... mais il arrive que la situation m'englobe sans que je ne l'aie cherché. Preuve de mon aspect tranquille et parfois même asocial; les 5 québécoises présentes dans l'hostel à Séville ne m'ont toujours pas repéré! :-)
Mais parfois, il y a des exceptions. Comme un simple souper tranquille - restes d'un brie d'hier avec mini-baguette et restes d'un petit rosé - peut rapidement se transformer en expérience internationale, une télé et la FIFA aidant.
Ce soir à Séville (tu vois, Daniel, même après autant d'alcool, je peux encore penser à toi!), dans mon hostel, on diffusait en direct la partie Brésil contre Corée du Nord. Notant la chose, je me suis installé avec mon fromage, ma baguette et mon vin dans la salle commune, où deux types ont syntonisé le match une minute avant le coup d'envoi.
Rapidement, la salle s'anime. Deux asiatiques - des coréennes du sud - se joignent d'abord à nous pendant que leur souper chauffe au four. Puis arrive un couple de brésilien et un couple de japonnais qui cuisinaient encore quelques minutes plus tôt. Sur la terrasse, dehors, trois québécoises ignorent l'engouement, en bonnes canadiennes :-).
Le propriétaire de l'hostel, un type dans le début de la cinquantaine fort sympathique et féru d'histoire locale, a préparé un gigantesque bol de sangria qu'il offre généreusement à tous les voyageurs hébergés chez lui. L'anglais de service (il semble toujours y en avoir un dans les hostels), et sa copine, déclinent l'offre, étant déjà occupés avec une grosse bière. J'accepte malgré mon vin; la sangria, bien fraîche est la bienvenue de cette chaleur. L'autrichienne qui travaille à la réception de l'hostel fait des allers-retours entre son poste et la télé.
Le match est plutôt tranquille, le Brésil semble dominer mais n'arrive pas à compter un but. Tous les visiteurs semblent prendre pour le Brésil, sauf un des premiers types présents, assis dans un coin, qui ne montre aucune réaction visible. Nord-Coréen? Bien qu'il ait des traits asiatiques, la chose serait étonnante, en Espagne, puisqu'il est plutôt rare de croiser des nord-coréens en voyage!
Quatre asiatiques s'ajoutent au groupe. Chinois? Difficile à dire, mais ils ne sont ni japonnais, ni vietnamiens. Je ne parle ni l'un ni l'autre, mais après un séjour au Vietnam et un atelier de japonnais, je me suis légèrement fait l'oreille, et je pense pouvoir reconnaître l'un ou l'autre, malgré la sangria qui coule à flots.
Bien que nous, au Canada et au Québec, ne soyons pas très partisans de foot, le reste du monde l'est. Pour ma part, n'étant partisan d'aucun sport avec intensité, mais appréciant l'effort sportif et le spectacle à l'occasion, la scène ramène en moi quelques souvenirs. Certains datent d'il y a quatre ans, alors que pendant le championnat de la FIFA 2006, j'étais en France lors des grandes victoires des Bleus, et en Espagne, justement, lors de leur grande défaite et la désormais célèbre tête à Zidane. Un des souvenirs récent me provient d'une collègue occasionnelle et contractuelle, originaire de France. Elle me contait il y a deux semaines que son mari, français lui aussi, n'avait toujours pas digéré la tête de Zidane, 4 ans plus tard. Eh bien, que je lui ai répondu, je ne suis ni français ni fan de foot, et je n'ai presque pas encore digéré cette tête non plus! :-)
De retour à Séville et au Garden Backpacker, la sangria coule toujours. Pour ma part, j'allonge mes verres avec le reste de mon rosé, ce qui le rafraîchit merveilleusement, mais l'alcoolise aussi joyeusement.
Le Brésil marque enfin, tout le monde crie de joie - moi inclus! Tout le monde? Hum, tous sauf l'asiatique tranquille dans son coin et le seul à ne pas prendre de sangria. Nord-Coréen? Woops, j'espère que non... Le proprio et moi continuons une discussion sur l'avantage de Séville sur Québec (quelques milliers d'années d'histoire). Il semble bien content de mon choix de passer quelques semaines ici, déplorant que la plupart des voyageurs n'y passent que 3-4 jours lors d'un rapide voyage en Espagne - Ooops, c'est exactement ce que j'ai fait en 2006... Je lui avoue, candidement, mais en ajoutant que j'ai assez aimé l'Espagne pour y revenir, et y choisir Séville comme port d'attache pour un séjour de plusieurs semaines, alors... Il en est ravi.
Le couple d'anglais nous quitte - ayant quelque chose de mieux à faire? - ainsi que le couple de japonnais... décidément... Moi, comme je suis célibataire, le foot et la télé demeurent la meilleure option disponible... Étrangement, le couple de brésilien reste, ce qui en dit long sur la force du foot dans certaines parties du monde, non? Hehehe.
Il s'avère que les quatre asiatiques sont de Taiwan. Information captée lors d'un free refil de sangria alors qu'ils sont forts impressionnés que je puisse parler espagnol avec le proprio, malgré mon origine canadienne. J'explique mon origine francophone, qui me facilite la chose, mais ils me pressent de questions et je fini par avouer que j'ai surtout appris en Amérique du Sud. J'insiste toutefois sur leur mérite de savoir se débrouiller en espagnol, une langue si éloignée de leur langue natale, quand même!
Soudainement, il y a un cheer up général, le second but du Brésil! Général? Ok, vous avez compris, l'asiatique du fauteuil du coin reste de marbre... Ah? Non... il sourit légèrement... Le proprio de mon hostel lui fait un thumbs up, et m'informe qu'il est sud-coréen! Le gars me fait un clin d'oeil et retourne au match, calmement. Hehehe. Ces asiatiques sont souvent moins démonstratifs que nous. Il savoure en silence la défaite de la Corée du Nord.
Plus tard, je remarque que les québécoises ont quitté la terrasse depuis longtemps - totalement indépendante de ce qui se passe dans le monde du foot - alors que la Corée du Nord marque un but! Panique passagère, avant que chacun ne réalise qu'il ne reste pratiquement plus de temps au chrono avant la fin officielle de la partie.
Je note à ce moment - oui, je sais, j'aurais pu remarquer avant, mais coup donc, je suis québécois et j'ai une demi bouteille de rosé arrosée de sangria dans le sang - je note, donc, que le gardien de but du Brésil s'appelle Julio Cesar. Sans blague. (Je trouverais la coïncidence stupéfiante puisque je lis un livre sur la jeunesse de Jules César, mais c'est une autre histoire, alors). Ceci me rappelle un de mes élèves de l'école San Luis de Lloa en Équateur, un des fils Aguirre, qui portait le même prénom. Le monde latino est rempli de ce genre de noms latins, évidemment. Pourquoi les québécois (et les français, évidemment) n'ont-ils pas hérité de ces noms typiquement latins? La faute à Astérix, j'imagine, ou son équivalent réel dans l'histoire de la Gaule.
Je ne sais pas si vous avez écouté un match de la coupe du monde cette année, mais ce qui m'a le plus marqué pendant la partie, c'est le bruit constant fait par la foule présente au stade. Des flûtes de plastique - genre carnaval de Québec, j'imagine - mais le bruit incessant m'a semblé tellement intense! Épuisant, à la longue, même.
Enfin, le match est terminé, les gens se dispersent dans l'hostel, sauf les 4 taiwanais, les deux sud-coréennes et moi-même. La télé diffuse maintenant un épisode de House, postsynchronisé en espagnol et personne ne s'en préoccupe. Le proprio me salue, et nous convenons tous deux que le premier match important de cette coupe du monde est demain (premier match de l'Espagne, j'ai hâte de voir ça dans les rues ici...). J'explique aux autres que comme le Canada n'est pas fort en foot et que nous ne sommes pas à la coupe du monde, je prendrai pour l'Espagne, étant sur place. L'autrichienne de l'hostel adopte la même position. On pourrait passer pour deux losers, mais coup donc, notre position a l'air digne, vu les circonstances.
Je réalise, alors que je rédige ce trop long billet - la faute de la sangria et du vin, j'ai tendance à devenir verbomoteur (clavieromoteur?) avec l'alcool - que ce commentaire sur le sport et l'alcool sera le premier que vous lirez suite à mon billet sur le transport. Ah, well, une fois n'est pas coutume. C'est comme pour Séville, au lieu de Sevilla (hehehe, santé, Daniel, je t'offre cette dernière gorgée de rosé-sangria!).
Le couple d'anglais revient dans le salon (qu'est-ce que je disais! hehehe).
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Hum, ok... demain avant-midi, je devrais m'installer dans une petite auberge qui deviendra peut-être mon chez moi pour les prochaines semaines, si ça s'avère un lieu propice pour travailler et écrire (ce que n'est définitivement pas un hostel avec dortoirs et salons communs). Je promets des billets plus sérieux à l'avenir, et plus axés sur les beautés de Séville, sinon le proprio du Garden ne sera pas fier de moi! :-)
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