La coupe du monde de football est une bonne occasion pour s’intéresser au vin de l’Afrique du Sud, 8ème producteur mondial. La pression internationale destinée à sanctionner ses dirigeants pour leur effroyable politique d’apartheid a longtemps restreint la distribution de ses vins hors de ses frontières. A ce jour, ils restent encore globalement peu connus. A l’intérieur aussi, les changements prennent du temps : seize ans après la chute de l’apartheid, les domaines et les grands restaurants restent majoritairement aux mains des Blancs, tandis que la main d’œuvre non qualifiée est surtout composée de personnes de couleur. Devant ce constat, les vignerons sud-africains ont formé quelques deux-milles serveurs de couleur à l’art de marier vins et plats, dans l’espoir de profiter du Mondial pour faire découvrir aux étrangers la richesse des crus locaux. Pour financer le projet, les vignerons ont créé un alliage de rouges nommé « Fundi » (« apprenti » en zoulou), permettant de générer les fonds nécessaires au projet. Une belle initiative qui, espérons-le, trouvera ses prolongements au-delà du dernier coup de sifflet du Mondial.
Les livres dédiés spécifiquement au vin sud-africain sont, à ma connaissance, inexistants en français. Même Hugh Johnson ne leur consacre que quatre pages dans son Atlas mondial du vin. On trouve les données les plus complètes dans le premier tome des Vins du nouveau monde du québécois Jacques Orhon. Histoire, géographie, cépages, sélection de producteurs et très belles photographies : le livre est remarquable. On y apprend que la vigne est cultivée depuis les années 1650 en Afrique du Sud, tout d’abord par les colons hollandais. Mais c’est l’immigration de quelques centaines de Huguenots français, après la révocation de l'édit de Nantes, qui contribua au véritable essor de la viticulture. Celle-ci se concentre exclusivement dans un rayon de 200 km autour de Cape Town, seule région du pays à jouir d'un climat méditerranéen. Le niveau qualitatif général n’est cependant pas très élevé. Avec 102.000 ha plantés (l’équivalant de Bordeaux), soit 1,2% de la superficie mondiale, l'Afrique du Sud réalise 3,3% de la production mondiale, signe de rendements excessifs.
Les vins du Nouveau Monde : Tome 1, Afrique du Sud, Australie, Nouvelle-Zélande. Jacques Orhon. 424 pages. Les Editions de l'Homme. 2008. 29,95 €.
Mais cette appréciation globale assez mitigée ne doit pas masquer la grande qualité de certains producteurs, sur les près de 5.000 que compte le pays. Si le vin est devenu l’un des principaux produits d’exportation de l’Afrique du Sud, de nombreux vins parmi ses meilleurs ne sont pas vendus à l’étranger. Le meilleur moyen de les découvrir serait encore de se rendre sur place et de prendre la route des vins entre deux matchs, loin des vuvuzelas. Réédité récemment, ce Guide essentiel des vins sud-africains saura vous accompagner utilement. Il permet de comprendre le système de délimitation en vigueur au travers des spécificités des terroirs en question. C’est intéressant de lire à quel point cette notion de terroir prend de l’importance, alors que l’on ne s’attend pas forcément à la trouver autant valorisée dans des pays plus enclins à mettre les cépages en avant. Le guide fait bien entendu la part belle aux producteurs de qualité en expliquant leurs spécificités. Il comporte de nombreuses cartes (dont l’absence est un peu malheureuse dans le livre de Jacques Orhon) et donne même les positions GPS des domaines cités ainsi que des informations touristiques plus générales.
The Essential Guide to South African Wines: Terroir & Travel. Elmari Swart. 200 pages. Cheviot Publishing. 2009 (première édition : 2006). 29,95 $.