À chaque dérapage les politiciens, les faiseurs d’opinion et les groupes d’intérêt rivalisent pour réclamer plus de règlementation. Un accident automobile déclenche la révision de l’ensemble des règles de la sécurité routière. Bientôt nous devrons porter un casque et des jambières pour se déplacer en auto; la mort d’une grenouille réveille tous les bien-pensants écologiques qui réclament ni plus ni moins que l’éradication des humains de la planète terre; l’hospitalisation d’une personne anorexique justifie le bannissement de toutes les publicités montrant une femme un tant soit peu svelte; un préposé à la clientèle s’adresse à un journaliste en anglais et il faut bannir l’anglais dans les cégeps; etc.
Bien sûr, j’exagère, mais personne ne semble réaliser que chaque fois que le législateur s’aventure au-delà des orientations de base, la réglementation, en plus de brimer inutilement les libertés individuelles, créent plus de problèmes qu’elle n’en résout.
1. La règlementation nuit à la créativité et à l’innovation. Combien de produits fermiers, en particulier des fromages, ne seront jamais accessibles aux consommateurs dû à des règlements rigides et souvent inappropriés? Combien d’entreprises ne verront jamais le jour parce que les embûches règlementaires ont poussé les entrepreneurs à la faillite ou à l’abandon avant que leurs projets naissent?
2. Les groupes d’intérêt courtisent le gouvernement dans l’espoir qu’une loi imposera leurs produits et services. Deux exemples de ce phénomène sont : l’addition d’éthanol dans l’essence et les tarifs sur l’importation de produits laitiers. Le premier, en augmentant la demande pour le maïs, favorise les producteurs de maïs. Le deuxième en maintenant le prix des produits laitiers élevé, favorise l’industrie laitière. Bien entendu et comme toujours, les contribuables et les consommateurs paient la note qui se chiffre par centaines de millions de dollars pour ces deux exemples seulement;
3. La réglementation peut créer ou détruire une industrie comme par magie que cela soit économiquement justifié ou non. Des exemples évidents de ce phénomène sont : le recyclage des déchets domestiques et l’obligation de dédier 1 % de la masse salariale à la formation en entreprise. Le pouvoir illimité du législateur oblige les entreprises à un lobby permanent auprès des politiciens soit pour obtenir des règlements favorables, soit pour empêcher ou alléger des règlements défavorables. Ce phénomène mine la confiance des contribuables envers les politiciens et le gouvernement;
4. Les règlements sont souvent, pour ne pas dire toujours, le résultat de compromis. Les groupes d’intérêt rivalisent dans le but d’obtenir des conditions favorables pour le groupe qu’ils représentent. Les politiciens manoeuvrent pour satisfaire le plus grand nombre de groupes d’intérêt possible trop souvent au détriment de l’ensemble de la population;
5. Certains groupes d’intérêt demandent des règlements dans l’unique but de se protéger de la concurrence. Deux exemples parmi tant d’autres : le règlement qui établi le prix plancher de l’essence vise à protéger les distributeurs indépendants; celui régissant les heures d’ouverture des épiceries vise à protéger les propriétaires de « dépanneurs ». Dans un cas comme dans l’autre, ces règlements sont inutiles et pénalisent les consommateurs;
6. La réglementation biaise, voire élimine, l’information nécessaire à la prise de décision. En particulier, les programmes de subventions ont pour effet de réduire les coûts réels d’un projet qui trop souvent se transforment en fiasco financier : Magnola, Papiers Gaspésia, usine d’éthanol-maïs, Norsk Hydro, les ateliers Davie, etc.
7. La réglementation a toujours des effets pervers plus ou moins importants. L’exemple le plus évident de ce phénomène est la réglementation de l’emploi dans l’industrie de la construction. Les lois et règlements visaient à améliorer l’efficacité et à éliminer les conflits. Trente plus tard, on réalise qu’on a plutôt créé un monopole syndical de l’emploi. Ce monopole n’hésite pas à menacer employés et employeurs pour conserver ses privilèges. De plus, il contribue largement au coût anormalement élevé de l’industrie de la construction du Québec.
8. Le législateur n’a pas à se préoccuper des analyses coûts-bénéfices d’une réglementation puisqu’il n’en assume pas les coûts. En particulier, les lois et règlements visant supposément à protéger l’environnement imposent souvent des coûts exorbitants et injustifiés aux promoteurs. Dans l’esprit d’une majorité de Québécois les promoteurs sont des manipulateurs malhonnêtes motivés par le profit alors que les écolos sont des anges qui veillent au bien-être des générations futures. Aussi, les politiciens n’hésitent pas à favoriser ces derniers au détriment des deuxièmes et de l’ensemble de la société.
9. Les motivations des élus et des bureaucrates ne correspondent pas toujours aux intérêts de la population. C’est ainsi que les lois et règlements en santé et en éducation favorise la multiplication des structures et des bureaucrates au détriment des services de première ligne.
10. Les règlements ont la vie dure. Il demeure en place longtemps après qu’ils soient devenus inutiles et nuisibles. À lui seul, le code de stationnement de Montréal est truffé d’un nombre effarant de normes abusives et anachroniques : la distance entre le véhicule et la bordure du trottoir, l’utilisation du frein manuel, le braquage des roues dans une pente, le verrouillage des portes, etc. De surcroît, la signalisation est toujours confuse, souvent contradictoire et parfois absente ou obstruée. Ainsi, un préposé zélé, frustré où à qui on a imposé des quotas, a tout le loisir de vous flanquer autant de contraventions qu’il le désire.
11. Les industries règlementées on une influence indue sur les agences de règlementation. L’UPA est l’exemple le plus représentatif de ce phénomène. Son influence est telle qu’on a souvent l’impression qu’elle dirige le MAPAQ et non l’inverse. Aucun ministre ou haut fonctionnaire n’osent la confronter même minimalement.
12. Les lois et règlements créent une fausse impression de sécurité. En général les gens croient naïvement que les lois et règlements vont les protéger en toutes circonstances. Par exemple les victimes d’Earl Jones se fiaient à l’AMF pour les protéger. Pourtant, il est évident qu’aucune loi ou règlement ne peut arrêter les filous. Lorsque les bénéfices potentiels d’une action sont suffisamment intéressants par rapport aux pénalités éventuelles, il y aura toujours quelqu’un prêt à prendre le risque de contourner la loi.
Bien sûr que la vie en société requiert un minimum d’encadrement pour éviter que la « loi du plus fort » soit celle qui régisse les activités entre citoyens. Toutefois, les lois et règlements doivent prioritairement définir les orientations de base et non pas codifier tous les gestes et actions journaliers de chacun.
Malheureusement, dans un État interventionniste comme le nôtre, l’abondance de règlementation et les effets néfastes que cela entraîne sont surtout le résultat de l’interventionnisme étatique. Plus l’État intervient dans la vie des citoyens, plus il y a de lois et règlements qui nuisent au bon fonctionnement de la société et brime les libertés individuelles.
De plus, lorsque le gouvernement fournit des produits et services à ses citoyens celui-ci représente toujours la partie du « plus fort ». Donc, c’est la « loi du plus fort » qui prime. Dans ce cas qui protège les individus? Bien sûr, les vérificateurs généraux, les ombudsmans, les tribunaux administratifs veillent à limiter les pouvoirs de la bureaucratie, mais ce sont des mécanismes bien imparfaits souvent gérés par les amis du parti au pouvoir.
Pour recouvrer notre liberté il est nécessaire que l’État se retire des nombreux champs d’activité qu’Elle a investit au détriment de la population, pour se dévouer à ses rôles « régaliens » de sécurité et de protection des individus.