Alors que le cumul des retraites est malheureusement monnaie courante pour un élu de la république, on osera à peine se réjouir du cumul impossible retraite - minimum vieillesse pour ces mêmes élus. A croire que la politique conserve ! A l'opposé, concernant les salariés qui n'ont pas eu la chance de travailler suffisamment longtemps ni de percevoir une rémunération très supérieure au SMIC, le cumul est tout aussi impossible. Et c'est très regrettable.
Paradoxe : si la retraite symbolise, pour ceux qui quittent un univers professionnel, la peur sociale de «ne plus bien vivre», de ne plus être socialement recyclable, cela signifie au contraire, pour ceux qui étaient exclus du système, les SDF et d'une certaine façon les salariés précaires, la possibilité d'un dernier rattachement à la société. Et c'est tant mieux.
Tant mieux mais passablement injuste dans la mesure où confondre en les fusionnant le minimum vieillesse et la retraite à laquelle on devrait avoir droit, si minime soit elle, relève d'une supercherie très peu dénoncée.
Pour y remédier, il serait pourtant simple
- de ne pas appeler «retraite» le minimum vieillesse et/ou inversement,
- d'additionner ce minimum vieillesse à un delta «retraite réelle» dans la mesure où celui ne dépasserait pas 50 à 75% du SMIC (à calculer et négocier).
- «de tendre» comme l'écrit Martin Hirsch sur son blog «le plus possible vers le droit commun. Difficile d'aborder la question de l'allongement de l'âge de la retraite et de la durée de cotisation si ceux qui votent la loi sont soumis à un régime éloigné du droit commun et qui ne serait pas affecté par des changements de règles qui s'appliquent à tous les salariés. Mieux vaut une rémunération dont le montant soit connu et qui soit soumis aux mêmes règles que les autres pour la fiscalité, pour les cotisations sociales et pour les droits à la retraite.» (C'est gentiment dit, mais concrètement Martin Hirsch s'en prend directement, et c'est heureux, aux régimes spéciaux.)
Au lieu de ça, l'essentiel du débat sur les retraites tourne autour de l'âge du capitaine et éventuellement de la pénibilité qu'il aura éprouvé à naviguer pendant soixante ans à travers les récifs et sirènes d'un code du travail plus ou moins respecté. La question du financement des retraites est évidemment majeure (1) & (2). Mais tant que l'on n'aura pas fait un état clair et complet des ressources disponibles pour résorber le déficit existant et celui qui s'annonce, il apparaîtra inutile d'en discuter.
Pire cette incapacité à présenter cet état risque de déboucher sur :
- une aggravation des inégalités comme celle consistant à «raboter» sans distinction les niches fiscales y compris celles concernant les aides sociales ou les incitations à des comportements environnementaux vertueux.
- le renoncement au système des retraites par répartition finalement «trop complexe» à maintenir dans un contexte économico démographique «défavorable».
Alors la ballade des soixante ans continue. C'est simpliste comme un bon slogan pour détourner l'attention, appâter le gréviste pour le 24 juin prochain et les rédactions sous le choc des vuvuzelas.