Sarkozy, danger sur les médias

Publié le 15 juin 2010 par Juan
Il est difficile de rester insensible aux sombres manoeuvres affectant les médias d'information. Le Monde, France Télévisions, Rue89, et, dans l'ombre, Thierry Saussez qui dépense des millions d'euros de publicité gouvernementale pour le plus grand bonheur d'une presse en crise.
Sarkozy manipule son Monde
Après un coup de fil au directeur du journal, Nicolas Sarkozy l'a tout simplement invité à déjeuner la semaine dernière. L'arrivée d'Orange, pour 40 millions d'euros, au secours du tour de table de Claude Perdriel, n'est pas anodine. Sarkozy ne veut pas que l'attelage Niel (patron de Free), Pigasse (ex-soutien de Ségolène Royal et repreneur des Inrocks) et Pierre Bergé ne parvienne à mettre la main sur le quotidien du soir. Le Monarque ne se cache même pas. Il a donc déjeuné avec Eric Fottorino. Aux Etats-Unis, si Barack Obama déjeunait avec le propriétaire du New-York Times, la nouvelle ferait jaser. On se demanderait de quel droit la puissance publique peut se pencher sur un quotidien d'information générale. En (Sarko)France, la consanguinité médiatico-politique ne surprend plus que quelques rebelles isolés.
A l'approche de l'élection présidentielle de 2012, l'Elysée est à l'affut.


Rue89 accusée
Un journaliste de Rue89 s'est retrouvé mis en examen pour recel dans l'affaire de la video de France 3 qui montrait un Sarkozy agacé quelques minutes avant une interview télévisée il y a deux ans. Il a refusé de donner sa source. Il risque 5 ans de prison au maximum. La plainte vient de France3.  Les réactions, négatives, se sont multipliés dans les médias. La protection des sources est un principe agaçant en Sarkofrance. Il faut des exemples, et décourager les récalcitrants.En 200!, la ministre Dati avait fait voter une loi qui mettait la France en conformité avec avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, après plusieurs condamnations pour des poursuites à l'encontre de journalistes. De surcroît, cette loi, loin de protéger intégralement le secret des sources, lui créait de nombreuses exceptions (collaborateurs non-journalistes, domicile ou tous lieux hors bureaux; et, plus généralement, «à titre exceptionnel et à condition que la nature et la particulière gravité du crime ou du délit et les nécessités des investigations le justifient» comme les enquêtes sur du terrorisme ou le crime organisé).
France Télévisions
Le Monarque va enfin pouvoir nommer «son» président de France Télévisions. Il aura bien fait durer le suspense. Patrick de Carolis s'est porté candidat à un second mandat. Un retour d'outre-tombe qui ressemble à un baroud d'honneur. L'homme n'a pas démérité. Il agace Sarkozy. Le Monarque avait un autre candidat en tête, un jeune ex-conseiller de Fillon. Alain Minc travaillait cette candidature, et a failli la griller trop tôt. Sarkozy s'est énervé. Il fallait faire croire que les jeux n'étaient pas faits. Quand Patrick de Carolis est passé à la télévision, au Grand Journal de Canal+, Sarkozy n'a pas apprécié. «Carolis n'a pas été très habile au Grand Journal.»  Le propos a été rapporté par l'un des participants à un autre déjeuner à l'Elysée. Nicolas Sarkozy recevait quelques «quelques éminents journalistes politiques». Ces derniers devaient se sentir tous flattés de bénéficier des honneurs présidentiels. Aucun n'a senti le trouble que cette nouvelle pouvait créer. Emmanuel Berretta, du Point, mentionne la présence d'Alain Duhamel (RTL, Libération), de Michel Labro (Nouvel Obs, tiens donc ?) et d'Alexis Brézet (Figaro). Le Monarque a fait semblant de prendre son temps. « Je ne dévoilerai aucun nom. Je veux prendre mon temps. J'ai plusieurs candidats possibles». Répétons la phrase: «J'ai plusieurs candidats.» Il a plusieurs candidats. C'est lui qui décide.
Saussez balance la pub
Les avez-vous remarqué ? Régulièrement, les pages de nos journaux sont encombrées de publicités gouvernementales. Thierry Saussez, qui dirige le Service d'information du gouvernement (SIG) en 2008, disposait de 49 millions d'euros en 2009 pour arroser les pages publicitaires de nos quotidiens. Récemment, on a pu voir cette propagande défendre la réforme des retraites, site Web sur-mesure à l'appui. Thierry Saussez a récupéré également une belle partie du budget sondage de l'Elysée. Pour cette année, il a commandé des prestations, similaires à celles antérieurement réalisées pour le compte de la Présidence, aux 7 mêmes instituts. Pour bien faire, son budget a été multiplié par 4 en 2009, et reconduit à l'identique en 2010, soit 3,9 millions d'euros. Le 17 mai dernier, l'Elysée a également lancé Waka, un site web d'information chez Skyrock: «Des infos et des avis pour réussir ton parcours. Exprime-toi pour que ça bouge !» Le site est une pure propagande 2.0 au service de l'action gouvernementale, la version «d'jeuns» d'Elysee.fr. Un exemple, voici comment le prêt étudiant, en service depuis septembre 2008, est promu :
«C’est pour qui ?
Le prêt étudiant garanti par l’État, accordé sans conditions de ressources ni caution des parents ou d’un tiers, c’est pour toi si :

  • t’es étudiant ;
  • t’as moins de 28 ans ;
  • t'as la nationalité française.
C’est combien ?
Le montant max est de 15.000 €.
L’État garantit 70% du capital restant du prêt, hors intérêts.
La durée de la garantie est de 10 ans max, à partir du premier versement des fonds. 
T’as la possibilité de faire un remboursement différé (partiel ou total, selon ton choix) c'est-à-dire que t’es pas obligé de commencer tes remboursements tout de suite auprès de la banque qui t’a fait le prêt.»
Trop cool ! Malheureusement, on ne trouve rien sur les rafles de sans-papiers («T'es pas Français ? Viens à la préfec' qu'on t'offre un café le temps de vérifier si t'es cool»), ni sur le bouclier fiscalt'es super-riche ? Super pour toi, file ton blé à tes parents pour qu'ils payent moins d'impôts !!»).

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