The Riches ou la vie banlieusarde remise au goût du jour
J'ignore pourquoi The Riches fut l'un de mes plus gros coups de coeur de l'année, pour le talent de Minnie Driver et Eddie Izzard, pour l'habileté de l'écriture, pour l'originalité des situations ou pour l'intensité dramatique qu'a su développer cette saison inaugurale, j'hésite encore beaucoup. Parce que c'est vrai, The Riches, c'est un tout unique qui captive du début jusqu'à sa jolie conclusion. Et si l'on remercie FX au passage pour avoir eu le bon goût de renouveler cette jolie trouvaille (à l'instar du tape à l'oeil et creux Dirt qui ne méritait que trois diffusions maxi), on pouvait au season finale d'ores et déjà se dire que ces douze premiers épisodes valaient, déjà, drôlement le détour.
The Riches suit l'histoire des Malloy, une famille de bohèmes, de voyageurs, de voleurs expérimentés, de nomades rusés qui à la suite d'un tragique accident de voiture, décident de quitter cette vie qu'ils ont toujours connus et de renaître dans la peau des Riches, couple aisé, décédé dans ledit accident.
L'idée de départ n'est pas la plus grande qualité de The Riches, parce que certains épisodes frôlent parfois avec le carrément invraisemblable -il est effectivement difficile de croire qu'une famille de voyageurs puisse si facilement se faire passer pour des individus qu'ils ne sont vraiment pas, notamment Wayne dans la peau de Doug Rich, brillant avocat apprécié de tous. Si l'on s'inquiète donc plus ou moins du sort réservé à cette famille à chaque potentiel danger, on peut cependant se dire que la série tient « scénaristiquement » la route.
Des personnages hauts en couleur, au caractère bien trempé
Mais "The Riches", ce n'est pas non plus que ces Rich supposés sans histoires, la personnalité des Malloy restant omniprésente à Edenfalls. En chef de famille, on trouve Wayne, un père attentif et mari aimant, rusé et débrouillard, il s'accommode de toutes les situations. S'il est proche de sa famille, Wayne entretient un rapport particulier avec sa belle-famille. N'ayant d'une part pas apprécié que Dahlia aille en prison à la place de Wayne, la famille de Dahlia n'apprécie pas non plus la place que Wayne tient dans leur tribu, et notamment Dale, le fils du chef de la tribu. Lorsque Wayne décide de fuir le camp, et accessoirement d'emprunter une somme non négligeable d'argent à la tribu, c'est toute la famille qui se retourne contre Wayne et qui souhaite le retrouver pour se venger. Cette storyline est l'arc principal de cette saison inaugurante. Intense, haletante, parfois violente, cette storyline nous plonge dans un univers particulier qu'est celui des voyageurs, leur mode de vie, collectif, solidaire et malsain, dans la lignée de Big Love et la communauté mormone.
Contrairement à Wayne, sa femme, Dahlia est quelqu'un de profondément fragile. Dès sa sortie de prison au milieu du series premiere, Dahlia semble très à fleur de peau. Son séjour carcéral la rendut angoissée et perdue et c'est en prenant régulièrement de l'héroïne que Dahlia sort petit à petit de son mal-être permanent. Dahlia est un personnage touchant et d'une justesse désarmante, et c'est par amour pour son mari et ses trois enfants qu'elle s'efforce tout au long de la saison de combattre ses démons intérieurs. Peu à peu, Dahlia se rév2la plus forte et plus déterminée, et nous offre un spectacle à la fois haut en couleur et émouvant. Dahlia Malloy/Cherien Rich est un personnage complexe, et l'interprétation parfaite de Minnie Driver est un atout majeur du personnage.
Les enfants des Malloy sont tout aussi surprenants et passionnants que les parents. L'aînée, Deedee, est une jeune fille mûre et intelligente. Proche de sa mère, elle va, en s'introduisant peu à peu dans le milieu bourgeois et rangé dans lequel elle vit, s'émancipait de ses origines bohèmes, ce qui désolera sa mère et son frère cadet. Mais en acceptant d'épouser un jeune homme bêta du camp pour éviter de gros problème à sa famille, Deedee montre son attachement à cette dernière et son sens des responsabilités.
Le frère cadet, lui, est un bohème pur et dur, ayant placé son père sur un piedestal, il admire leur mode de vie et se sent très solidaire de sa famille. Malheureusement, son amour pour une jeune fille du camp lui rappelera le goût amer de la trahison. Ne parvenant pas à s'acclimater de son nouveau milieu, Cael, se sentira très esseulé et peinera à retrouver son bonheur d'avant.
Le plus jeune de la famille lui, est le petit protégé des Malloy. Très mature pour son âge, Sam, participe volontiers aux ruses de sa famille, notamment en se déguisant en fille ou en jouant l'élève parfait au proviseur de son école. Ses manières efféminées, son goût pour le français, ses barrettes dans les cheveux, ses envies de travestissement à toute heure de la journée, font du jeune garçon quelqu'un d'unique en son genre, à la fois cocasse, complexe et très attendrissant. Soutenu par sa famille entière, et notamment ses parents et sa grande soeur, c'est à travers lui que l'on ressent l'harmonie et l'union de cette famille pas comme les autres.
Une série réaliste, ciblée, dramatique : définitivement à suivre
Offrant de bons moments dramatiques dans la veine de Meadowlands ou Big Love, et des situations hilarantes et anecdotiques pareilles à Weeds, The Riches est le résultat du mélange subtil qu'est l'intensité lacrymale du drama, l'humour corrosif de la bonne comédie et le déroulement narratif maîtrisé du chef d'oeuvre.
Plus original, plus touchant, plus réaliste que la plupart des séries portant sur le sujet "vie banlieusarde", The Riches parvient à démontrer l'hypocrisie du microcosme banlieusard et les revers d'une société élitiste et méprisante.
Traitant de sujets nombreux et variés, tels le pouvoir, la famille, l'homosexualité refoulée, la drogue, la souffrance quotidienne de gens sans histoires, l'état de nécessité des plus démunis, The Riches est une oeuvre fascinante, aussi divertissante qu'intéressante et permet un regard neuf et juste sur la vie banlieusarde américaine et la difficile intégration à un monde brillant, élitiste et condescendant.