Dictionnaire de la Mort (s/d) Philippe Di Folco - Éditions Larousse, collection In Extenso
Premiers paragraphes de la notice Silence - Marc Villemain
(Version un tout petit différente de celle publiée)
Le silence n'appartient qu'aux morts : là est bien notre seule certitude.
Cependant, le 0 dB (zéro décibel) est un mythe, qui ne se rencontre en aucun point sur terre : le son utilisant l'air pour circuler et se propager, il faudrait pour cela des espaces totalement privés d'air ; or, par définition, un espace privé d'air serait irrespirable. Le silence est donc toujours un bruit, il n'est jamais vide de sons. Ce que nous n'entendons pas, des sonomètres le captent, à l'instar de certains animaux (ultrasons). Il ne saurait être absence de sons, mais plus prosaïquement absence de sa perception. Les morts seuls, donc, connaissent le parfait silence - si tant est qu'ils puissent "connaître" quoi que ce soit.
Les humains associent le silence à des paradigmes paradoxaux. Éminemment désirable pour les uns, hautement effrayant pour les autres, le silence est toujours objet de fascination. C'est d'ailleurs par une minute de silence que l'on célèbre tel événement dramatique, telle disparition d'une personnalité ; c'est encore dans un "silence de mort" que nous nous recueillons, dans notre intimité ou dans des appropriés où le silence est d'ailleurs souvent exigé (panneau, signe). "Faire silence" constituerait donc le moyen le plus adéquat d'approcher ce vide qui pour nous symbolise la mort, une manière aussi de nous y préparer, de l'attendre, de l'entendre. Les monastères, lieux de silence s'il en est, attestent de cette spiritualité par le vide, qui permet tout à la fois d'entrer en soi pour être au plus près de la Création et d'avancer au plus près vers la Parole de Dieu. Notons que silence et morbidité font bon ménage dans et à l'approche des hôpitaux. ... (Suite dans le Dictionnaire de la Mort)