Théâtre du Rond-Point
2bis, avenue Franklin-Roosevelt
75008 Paris
Tel : 01 44 95 98 21
Métro : Franklin-Roosevelt / Champs-Elysées Clémenceau
Tour de chant de François Morel
Textes de François Morel
Mise en scène de Juliette
Musiciens : Lisa Cat-Berro, Muriel Gastebois, Antoine Sahler
Ma note : 8,5/10
Mon avis : Du plaisir, un énorme plaisir… On espérait que de la copulation artistique François Morel-Juliette allait naître un rejeton original et non formaté. Et bien le résultat a été au-delà de mes espérances. Tout a été pensé dans le moindre détail, de l’entrée en scène jusqu’au(x) rappel(s). La scène est un joyeux foutoir mi bric-à-brac, mi-brocante, mi-guinguette (je sais, ça fait trois mi, mais je m’en fous comme du tiers. Trois mi, c’est aussi le début d’une mélodie et comme on est dans un spectacle musical… Et puis cessez de m’interrompre quand je raconte. Où en étais-je ? Ah oui…) un joyeux foutoir dans lequel se côtoient des objets hétéroclites ; objets qui serviront à un moment ou à un autre de décor voire de partenaire… Ce n’est pas François Morel qui apparaît mais une sorte d’Indiana Jones échappé du bocage normand. En fait, il n’en porte que le chapeau. Son torse recouvert d’un marcel ne lui donne pas une allure des plus glamour. Disons que le père François, c’est plutôt l’aventurier de la vache perdue… Pendant qu’il se rase (si, si, vous avez bien lu), il reçoit de la visite. Deux jeunes femmes et un homme très élégamment habillés façon années 30, les deux dames arborant de fort mimis bibis. Morel prend le temps de boire un petit coup de rouge pour se donner de l’allant et c’est parti… Nos trois touristes endimanchés (Les habits du dimanche, on le sait, sont chers à François Morel) sont en fait des musiciens. Chacun se glisse derrière son instrument ou s’en empare. Et c’est parti pour un tour de chant enchanteur.
Dans le « bazar » de Morel, on trouve de tout. Et ce qui n’est pas en vitrine, vous pouvez le demander à l’intérieur, du côté du cœur : humour, satire, tendresse, révolte, poésie (beaucoup de poésie), absurde, humanité, fraternité. Il joue de subtiles saynètes avec ses acolytes, faisant revivre parfois l’ébauche d’un sketch à la Deschiens. Il manie l’alexandrin avec une délectable maestria, il joue de la paupière tombante, sort tout son arsenal de mimiques-qui-n’appartiennent-qu’à-lui… François Morel n’est ni un comédien qui chante, ni un chanteur qui joue la comédie, c’est tout simplement un artiste complet évoluant dans un univers plein de fraîcheur et d’inventivité. Il est à l’aise dans tous les registres, passant de la farce la plus potache à la gravité la plus profonde sans jamais se départir d’une rare authenticité. Aucune de ses chansons ne laisse indifférent. D’abord, elles sont toutes sacrément bien écrites ; ensuite, elles abordent autant des sujets banals de notre quotidien (comme le GPS), des sujets intimes (le bain de pieds), que des sujets qui donnent à réfléchir (Le bon Dieu entre nous, C’était comment déjà ?) ou des faits de société inquiétants (Fatigué fatigué)…
Son spectacle est un grand moment de music-hall, c’est la quintessence du tour de chant. Il est en outre parfaitement secondé par des musiciens qui sont plus des complices que des accompagnateurs et qui font partie intégrante du show. Il faut d’ailleurs aussi souligner la qualité, la variété et l’originalité des arrangements faisant de chaque morceau une petite œuvre à lui tout seul.
Bref, vous l’aurez compris, les yeux comme les oreilles emplis de ravissement, je suis sorti EN-CHAN-TE de ce spectacle. Merci beaucoup m’sieu Morel. Vous êtes quelqu’un de rare, donc de précieux.