Le jour je m’égarais sur de grandes bruyères terminées par des forêts.
Qu’il fallait peu de chose à ma rêverie:
un feuille séchée que le vent chassait devant moi,
une cabane dont la fumée s’élevait de la cime dépouillée des arbres,
la mousse qui tremblait au souffle du nord sur le tronc d’un chêne,
une roche écartée, un étang désert ou le jonc flétri murmurait!
Le clocher du hameau, s’élevant au loin dans la vallée, a souvent attiré mes regards;
souvent j’ai suivi des yeux les oiseaux de passage qui volaient au-dessus de ma tête.
Je me figurais les bords ignorés, les climats lointains où ils se rendent;
j’aurais voulu être sur leurs ailes. Un secret instinct me tourmentait;
je sentais que je n’étais moi-même qu’un voyageur;
mais une voix du ciel semblait me dire:
« Homme, la saison de ta migration n’est pas encore venue;
attends que le vent de la mort se lève,
alors tu déploieras ton vol
vers ces régions inconnues que ton coeur demande. »
Levez-vous vite,
orages désirés
qui devez emporter René
dans les espaces d’une autre vie!
Ainsi disant, je marchais à grands pas,
le visage enflammé,
le vent sifflant dans ma chevelure,
ne sentant ni pluie ni frimas,
enchanté, tourmenté, et comme possédé
par le démon de mon coeur.
(René de Chateaubriand)
posté le 10 décembre à 17:22
je ne suis pas sure de l hermetisme mais pour le romantisme oui et la langue est si ample et si belle
posté le 24 mai à 12:52
poème du romantisme plein de de force et d'hermetisme