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Malgré la difficulté inhérente à la lecture d’une traduction datant de cette époque – j’ai trouvé le livre chez un antiquaire : il s’agit de l’édition de Firmin-Didot de 1835, traduit par Albert Montémont, et elle est composée en caractères très petits sur deux colonnes – je suis allée d’étonnement en étonnement.
Les tournures sont anciennes et les règles de chevalerie bien éloignées de notre XXIème siècle, certes, mais la construction du roman demeure particulièrement astucieuse et très actuelle. Flash-backs, dialogues, scènes d’action alternent avec des descriptions de décors courtes et efficaces. Tout commence et tout finit par un tournoi, les héros prennent forme et couleur avec grâce, les sentiments sont nobles ou abjects, les rebondissements et le suspens haletants.Tout est déjà en place, effectivement, pour une œuvre cinématographique.
Le rôle de Robin des Bois, "sire" de Locksley en la forêt de Sherwood, n’est cependant pas le plus important. Il intervient pourtant de manière décisive en au moins trois occasions, mais là n’est pas le noyau de cette histoire mouvementée. Le rôle-titre, Ivanhoé, ou "El Desdichado" (le chevalier deshérité, qui a suggéré à Gérard de Nerval le titre de son poème...) puisqu'il apparaît en lice sous ce pseudonyme à son retour de Terre Sainte et afin de ne pas se faire reconnaitre de Cédric, son père (comme dans le film de Ridley Scott), n’est pas non plus le plus profondément analysé, même s’il structure l’intrigue.Le personnage principal, la cause première, est une jeune fille parée de toutes les qualités : une beauté étincelante, un maintien de princesse, une modestie et un courage devant l’adversité à toute épreuve, même celle de la menace du bûcher, des talents de médecin reconnus, un désintéressement absolu…. Et cette beauté, Rebecca, est juive !L’essentiel du roman de Walter Scott est là : faire fi des préjugés
absurdes entretenus depuis des siècles contre les Juifs. Certes, ils exercent
le métier de banquiers – mais c’est bien parce que les nobles ecommeles manants
sont incapables de gérer correctement leurs ressources et s’épuisent en
conflits inutiles comme la Croisade – mais ils adorent le même Dieu que les
chrétiens et doivent être traités comme des citoyens. Quel credo, alors que tous le 19ème siècle s'affiche comme antisémite à tout crin !
J'aimerai bien savoir comment de jeunes lecteurs d'aujourd'hui apprécieraient ce livre.....car je suppose qu'il doit exister une édition en français courant (comme la Bible que nous venons d'offrir à Jean-Baptiste !) ?