L’Évangile de ce onzième dimanche du temps ordinaire est l’épisode de la pécheresse pardonnée (Luc 7, 36-50, 8, 3).
Le pharisien a invité Jésus à sa table, ce qui est une marque de ses bonnes dispositions.
Les convives sont attablés, allongés sur des coussins, le long d'une grande table.
La porte reste ouverte.
Une prostituée se permet d'entrer et s'approche de Jésus.
Son entrée choque inévitablement, c'est une pécheresse, une personne impure, sa place n'est pas ici.
Elle s'avance pourtant, elle pleure, mais de joie, car elle se penche vers les pieds de Jésus.
Ses larmes coulent, elle les essuie avec douceur avec ses cheveux et elle ouvre un flacon d'albâtre et verse du parfum.
Le maître de maison est étonné et ne comprend pas pourquoi Jésus ne chasse pas cette femme.
Elle doit aussi, se poser la même question.
En entrant, elle craignait d'être repoussée, et c'est pour cela qu'elle pleure parce que l'homme de D.ieu ne lui manifeste aucun mépris. Ses larmes sont de la reconnaissance.
Toutes les marques d'amour qu'elle donne à Jésus sont la preuve qu'elle comprend que Jésus ne la condamne pas.
Le pharisien, lui, traite d'égal à égal avec Jésus, il n'a aucun pardon à demander, puisqu'il se considère comme juste.
Voilà toute la différence entre lui et la femme.
Elle a su reconnaître en Jésus un envoyé de D.ieu, et elle est éperdue de reconnaissance parce que le pardon qu'elle souhaitait lui apparaît comme une évidence.
Le pharisien, au contraire, non seulement, n'avait selon lui, pas de pardon à demander pour lui-même, mais, plus grave peut-être encore, il se méprend complètement sur le pardon de D.ieu.
Il croit connaître D.ieu et donc, à ses yeux, Jésus n'a pas le comportement qui conviendrait à un prophète.
Celui-ci devrait la repousser car, pour lui cette femme est impure et le pardon devrait être précédé par un changement de conduite. Alors seulement, D.ieu accepterait de pardonner.
Il ne sait pas que c’est le pardon de Dieu qui donne la force de changer.
Le changement de conduite sera la conséquence du pardon.
Luc dit bien que les femmes qui ont été délivrées de leurs démons par Jésus ont pu se mettre à sa suite.
De plus, quand Jésus dit à la prostituée "Je te pardonne", il lui demande en fait de se pardonner à elle-même.
Nous ne pouvons accepter le pardon de D.ieu que si d’abord nous savons nous pardonner à nous-mêmes.
L’autre leçon est que D.ieu ne veut pas que les pécheurs soient isolés et bannis.
Le Tanakh le dit abondamment, puisque D.ieu y est appelé "miséricordieux", c'est-à-dire attiré par la misère physique ou morale.
Mais beaucoup de Juifs à l’époque l’avaient oublié comme ce pharisien imbu de lui-même.
Pour le pharisien, Jésus, qui ne craint pas de laisser s'approcher une pécheresse publique, commet lui-même une impureté. Il en déduit qu’il ne peut donc pas être un homme de D.ieu.
Luc revient à plusieurs reprises sur ce thème de la miséricorde de D.ieu.
C’est ce que Jésus est venu enseigner.
On le voit dans le récit du festin chez Lévi, le publicain, "Lévi fit à Jésus un grand festin dans sa maison ; et il y avait toute une foule de collecteurs d'impôts et d'autres gens qui étaient à table avec eux. Les Pharisiens et leurs scribes murmuraient, disant à ses disciples : Pourquoi mangez-vous et buvez-vous avec les collecteurs d'impôts et les pécheurs ? Jésus prenant la parole leur dit : Ce ne sont pas les bien-portants qui ont besoin de médecin, mais les malades. Je suis venu appeler non pas les justes, mais les pécheurs pour qu'ils se convertissent" (Luc 5, 29-32).
On le voit encore, dans la rencontre avec Zachée, "Le Fils de l'homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu" (Luc 19, 10).
Tout ceci valait à Jésus une mauvaise réputation dont il était bien conscient.
Juste avant le récit de la pécheresse, Luc rapporte qu'on parlait de lui dans des termes peu flatteurs, "Voilà un glouton et un ivrogne, un ami des collecteurs d'impôts et des pécheurs" (Luc 7, 34).
Les pharisiens et les puissants imbus de leur vertu et de leur pouvoir en ont déduit que Jésus n'était pas le Messie.
Mais le petit peuple juif, les humbles, les demandeurs de pardon ne s'y sont pas trompés. Si Jésus est l'ami des pécheurs, alors, il peut bien être l'envoyé du D.ieu de miséricorde.