L’ours ou complainte de la jeune veuve
Seulette suis dans mon grand lit de fer.
La bise rage et c’est toujours l’hiver,
le froid me prend des cheveux aux orteils.
Je ne vois plus ni flamme ni soleil,
des mains de glace agitent mon sommeil,
seul le silence habite ma maison.
Ah! Monsieur l’ours qui dans les bois vivez,
dans la profonde grotte sous la neige,
venez vers moi et je vous ouvrirai,
vous comblerai de miel, de confitures,
enfin, blottie contre votre fourrure,
m’endormirai dans ce nid de tiédeur
tandis que doucement, de votre haleine,
au creux du lit vous saurez réchauffer
mon pauvre cœur et mon corps délaissé.
(Jean Joubert)
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