Le téléphone sonne, une voix que je connais bien me dit qu'il me passe S.
Je commence par un "Bonjour ! Comment ça va ?"
Elle me répond "Je vais bien".
Jusqu'à là c'est facile, c'est une de ses premières leçons de français qu'elle avait eu à Bhuba.
Puis les choses se compliquent, j'essaye de lui poser des questions simples, sur son nouveau quotidien français. Elle me comprend difficilement, et je sais bien qu'elle ne m'appelle pas pour me raconter sa vie...
Son papa m'explique. Elle a le blues de ses 3 copines. Elle aimerait les revoir, au plus vite. Qu'elles soient dans l'avion juste après le sien qui l'avait mené dans sa ville de provice, comme c'était le cas dans nos trois taxis en Inde. Qu'elles habitent dans la maison d'en face. Mais non, des centaines de kilomètres les séparent. Et il a eu des niouz des deux autres familles, c'est pareil chez eux aussi, les trois filles sont tristes des unes et des autres...
Voyager avec trois familles, c'est génial et j'ai adoré, même si point de vue GO ca peut être un peu plus lourd (inertie de groupe, communications à répéter, plus d'aléas etc). Pour les familles c'est chouette aussi lorsqu'il y a bonne entente. C'est rassurant de voir qu'on est tous dans la même galère, c'est plus léger lorsqu'on peut rigoler un peu malgré le stress. Pour les minettes, c'est aussi très cool, ça permet de partir ensemble, bcp moins stressant que de partir seule. Et ca permet de jouer et de rester ensemble pendant tous ces temps plutot que de s'ennuyer avec des gentils parents qui ne te comprennent même pas.
Nos trois gamilles de Bhuba, en minettes malignes qu'elles sont, ont compris qu'elles pouvaient elles aussi profiter de cette effet de "masse", en formant leur bande à elles, schintant la couleuvre pas toujours facile à avaler, celle de l'attachement avec ces nouveaux parents, très sympas certes, mais quand même bizarres car débarqués d'une toute autre planète. Les petites sont devenues siamoises (lorsqu'une a envie d'aller aux toilettes, les autres la suivent ...), et les parents ont eu bien du mal à faire leur place malgré nos efforts communs (accompagnatrices inclues !) pour les séparer "à coup de hachette" tant leur fusion était forte. Et puis on le sait tous, les filles morphlent de leur séparation avec l'orpheu, les conditions de vie ne sont pas toujours évidentes lors des ces périodes de transition indiennes, alors doit on leur rajouter une couche "vasy fais tes devoirs et bosse sur la construction du lien avec tes parents" ?
Voyager à plusieurs familles peut aussi être un handicap pour la construction du lien entre parents et enfants, et ce n'est pas la première fois que j'ai eu échos de ce phénomène de "bande" (sachant qu'une bande peut être peuplée uniquement deux filles "contre" la bande des deux mères venues les chercher !!!).
Mes gamines étaient cigales en Inde, malgré tous nos efforts. Et voilà, en cette période de bise française, la réalité est dure à accepter, les larmes fusent, la tristesse coule de l'autre côté du téléphone... Et nous, parents, accompagnatrices, nous sentons bien impuissants et tristes face à leur profond désespoir.
On le sait, c'est pour leur bien, mais pourtant nos coeurs saignent aussi. Mais sans doute qu'à cette triste occasion, les parents diront pour la première fois à leur enfant qu'ils sont là et seront toujours là pour l'aider au mieux dans les périodes noires de sa vie.
Et heureusement que d'ici 15 jours, ce ne sera plus qu'un mauvais souvenir...