17 mai 2010
LA MILLE ET DEUXIÈME NUIT - THÉOPHILE GAUTHIER
À force de fréquenter la BlogÔlivres, on arrive à nouer des amitiés qui, même si elles sont virtuelles, n'en sont pas moins sincères. C'est ainsi que j'ai fait la connaissance d'Anne-Sophie ! Je vous invite à visiter son blog. Les commentaires qui l'agrémentent vous montreront, si besoin est, combien elle est appréciée !
La BlogÔlivres, disais-je... Anne Sophie, dans ce cercle d'amateurs, est une généreuse blogueuse... Il y a peu de temps, une enveloppe, mince et discrète, venue de sa part, est arrivée chez moi. Juste "comme ça"... parce qu'on communique... parce qu'on s'intéresse l'une à l'autre... parce qu'on s'offre quelques mots sur MSN, de temps à autre....
Anne Sophie m'a adressé, "comme ça", pour le plaisir, pour le sien, pour le mien, un superbe recueil de Théophile Gautier, des Éditions Mille.et.une.nuits...
Après vous avoir évoqué mes sentiments d'amitié, il est temps, maintenant, que je vous parle de mes sentiments de lectrice !
Même s'ils ne nous ont pas été conté dans notre enfance, même si nous ne les avons pas lu dans leur intégralité, nous connaissons tous, de près ou de loin, LES CONTES DES MILLE ET UNE NUIT... Aladin... par exemple !
On raconte qu'en ce temps-là,
Sharhyar était un roi puissant et respecté.
Mais cela ne l'empêcha pas d'être trahi et trompé par sa femme.
Ayant la certitude qu'on ne peut rien faire contre la ruse et la perfidie des femmes,
Sharhyar fit exécuter ses deux épouses et mille et un jeunes filles parmi ses esclaves.
Il décréta que chaque femme qu'il épouserait
N'aurait qu'un destin d'un jour et une nuit.
Il décima toutes les femmes de son royaume.
Bientôt, il ne resta plus que les filles de son vizir. Shéhérazade,
La fille aînée, décida de défier son terrible destin.
Elle savait quelles sentences l'attendaient ;
Mais elle savait aussi qu'elle pouvait sauver l'espèce humaine. Et son combat dura mille et une nuits...
Au matin de cette mille et unième nuit, l'imagination de Shéhérazade se trouva stérile... Consciente que sa tête serait mise à couper si elle n'enchantait plus le roi, elle partit, à la hâte, en quête de quelque feuilleton, de quelque nouvelle, qui pourrait combler les vingt-quatre heures d'un homme capable de n'être satisfait que de chimères.
Attendri cependant par la détresse de la jeune femme (et surtout par sa beauté), il lui dicta un conte qu'il avait imaginé.
C'est l'histoire de Mahmoud-Ben-Ahmed, " bien fait de sa personne, de visage régulier et de mine agréable, [...] qui avait formé le projet d'être l'amant d'une péri (génie, version féminine, de la mythologie arabo-persanne) ou tout au moins d'une princesse du sang royal".
Mahmoud résiste à tout autre convoitise, quelles que soient les prétendantes.
Un matin, alors qu'il se rend au bazar voisin, il surprend, derrière les rideaux de velours d'une litière, le visage dévoilé d'une fort belle dame.
Le voici épris de cette merveilleuse icône. Il n'aura de cesse que de lui donner corps.
Il parvient à retrouver la belle à laquelle il déclare, en vers, sa flamme nouvelle. Elle s'en laisse conter, et il apprend qu'elle n'est autre qu'Ayesha, la fille du calife. Transporté d'émotion, il se réjouit de n'avoir jamais dévié de son projet ! Il rimaille de plus belle, il ne cesse de versifier pour apprivoiser sa muse à laquelle, le nez dans ses ballades il déclame de précieuses galanteries, en oubliant de la contempler.
Lorsqu'enfin il relève la tête, Ayesha n'est plus la même. "C'est dommage qu'absorbé par la perfection de vos rimes allitérées, vous ne m'avez pas regardée tout à l'heure, vous auriez vu... ce que vous ne reverrez peut-être jamais plus. Votre vœu le plus cher s'est accompli devant vous sans que vous vous en soyez aperçu. Adieu, Mahmoud-Ben-Ahmed, qui ne vouliez aimer qu'une péri", lui déclare-t-elle en s'éclipsant à jamais.
Éperdu de la douleur de n'avoir pas su saisir sa chance, il ne s'aperçoit pas que Leila, une jeune et resplendissante esclave qu'il a recueillie pour lui éviter d'être tuée par son ancien maître, s'ingénie à lui rendre quelque joie de vivre et l'aime avec sincérité. Il ne sait, ce Mahmoud-Ben-Ahmed, ni donner, ni recevoir !
Lorsqu'enfin il condescendra à se défaire de ses chimères, il découvrira, médusé, qu'Ayesha, que Leila sont en réalité les différentes apparences de Boudroulboudour, une péri du premier ordre. Il épousera, aux yeux de tous, l'esclave Leila, mais c'est la fée, dans son cœur, qui le comblera de bonheur.
Théophile Gautier ne saura jamais si Shéhérazade eut la vie sauve grâce à ce mille et deuxième conte, mais la perspicacité de Sharhyar n'aurait-elle pas déjoué le sens profond de cette histoire ?
Quel beau texte qu'Anne-Sophie m'a donné l'occasion de découvrir !
Vraiment, mille et deux remerciements pour cette délicate et somptueuse attention !
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