La confiance des citoyens joue un rôle majeur dans la transmission d'une politique économique à travers le multiplicateur fiscal. Aujourd'hui, la dette publique est si élevée que le doute est légitime sur la capacité du système à éviter une crise. La recette keynésienne ne marche plus.
Angela Merkel a-t-elle tiré les leçons de l'absence de crédibilité de gouvernements qui n'appliquent pas les traités qu'ils ont signés ? Les programmes d'austérité vont-ils aggraver la situation comme le prétend le Nobel d'économie Paul Krugman ?
La théorie économique dont Paul Krugman se fait l'apôtre soutient que la réduction des dépenses publiques accroît le chômage, réduit les recettes fiscales et aggrave finalement les déficits. Ce courant de pensée keynésien a dominé la politique économique depuis huit décennies. Mais la crise jette une lumière crue sur ses limites.
Ce modèle s'appuie sur ce que l'on appelle le multiplicateur fiscal. C'est un peu technique, mais il est nécessaire de l'expliquer. Ce multiplicateur est de 1 lorsqu'un pays qui accroît les dépenses publiques de 1% augmente le PIB de 1%. L'effet n'est pas automatique. Le multiplicateur varie considérablement. Il peut même être négatif. Dans ce cas, une augmentation des dépenses publiques conduit à une contraction économique. Une telle situation peut se produire si un pays souffre d'un grave déficit public, accompagné d'un doute majeur sur la gestion du gouvernement et d'un risque d'inflation. A l'inverse, si le public est convaincu des besoins d'un plan d'austérité, une baisse des dépenses publiques peut provoquer une hausse du PIB. L'expérience s'est produite en Irlande de 1983 à 1986 et au Danemark de 1987 à 1989, selon le professeur Steve Hanke, de la Johns Hopkins University. La confiance du public joue en effet un rôle sous-estimé par les keynésiens. Aujourd'hui, face à l'étendue des déficits et des dettes publiques, une politique raisonnable du gouvernement et un budget équilibré peuvent donc restaurer la confiance, inciter à investir et soutenir la croissance.
Une situation semblable s'est déjà présentée dans les années 1980. Après avoir longtemps cru que la prospérité et le bien-être étaient liés à la hausse des dépenses publiques et de la sécurité sociales, le chômage et l'inflation des années 1970 ont fait l'effet d'un choc. Ronald Reagan a très bien analysé ce malaise et promis un retour de la prospérité en limitant la taille de l'Etat, ainsi que le montre John Samples dans son ouvrage [1]. « Le gouvernement n'est pas la solution. Il est lui-même le problème », lança Reagan. Mais il n'a de loin pas été le révolutionnaire qu'on imagine. Son « redressement historique » s'est traduit par une baisse de 4,7% des dépenses publiques dans son premier projet de budget. Rien de draconien ! Reagan n'était pas davantage un idéologue : il a été élu sur un programme destiné à accroître la prospérité en limitant l'Etat et non pas sur une plate-forme en faveur de la liberté individuelle. Son mérite a été de casser une tendance. Si la courbe des dépenses publiques s'était poursuivie au même rythme que les 30 années précédant Reagan, la taille de l'Etat américain serait de 25% supérieure aujourd'hui. C'est pourquoi Samples affirme que Reagan « a sauvé l'ancien régime » étatique en le réformant.
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[1] The struggle to limit government, John Samples, Cato Institute, 342 pages