« Cette exposition est prétexte à parcourir un siècle de bande dessinée et un siècle d’architecture« , explique à l’AFP Jean-Marc Thévenet, l’un des commissaires de « Archi et BD, la ville dessinée ». « Notre projet était de réunir deux types de créateurs, les architectes et les auteurs de BD, qui sont fondamentalement et avant tout des visionnaires du milieu urbain« , poursuit-il.
L’exposition est rythmée par des agrandissements de planches, des écrans tactiles, des toiles, des films et une magnifique maquette du musée Hergé à Louvain, un vaisseau futuriste imaginé par l’architecte Christian de Portzamparc, et une commande de Jean Nouvel à des auteurs de BD.
Le parcours est chronologique, des années 1900 à nos jours, et opère un zoom sur trois villes: New York, première icône dont les dessinateurs vont s’emparer, Paris, historique et moderne, enfin Tokyo, la ville de toutes les folies.
« Nous avons eu envie de faire cette exposition aux regards croisés pour ouvrir l’architecture à d’autres publics. Il y a beaucoup de correspondances entre architecture et BD. Et dans les deux +métiers+, tout commence par le dessin« , renchérit François de Mazières, président de la Cité de l’architecture et du patrimoine.
Dès le début du XXe siècle, avec des auteurs comme Winsor McCay (« Little Nemo »), la BD explore la ville et ses buildings, fascinée par le monde naissant qu’elle symbolise. « C’est une époque optimiste, avec des super-héros, et c’est ensuite l’idée, défendue par Le Corbusier, selon laquelle l’architecture va régler tous les problèmes de la société« , relève M. de Mazières.
Avec l’exposition universelle de 1958 à Bruxelles, l’école belge de la BD prend son envol. C’est André Franquin qui traduit le mieux en BD la modernité de ces années d’optimisme.
Il y a aussi la ville des utopies, une réflexion issue de la contre-culture des années 70, avec Enki Bilal ou Moebius. Ce dernier a fortement inspiré le cinéaste britannique Ridley Scott, auteur d’ »Alien » et de « Blade Runner », et Luc Besson et son « Cinquième Elément », explique Jean-Marc Thévenet, qui a longtemps présidé aux destinées du Festival d’Angoulême.
L’exposition montre aussi les filiations entre auteurs de différentes générations à l’instar de la « ligne claire » de la fin des années 70, comme Ted Benoit, Floc’h ou Joost Swarte, qui fait référence aux grands maîtres belges des années 50/60.
Illustrateur et dessinateur néerlandais, mais aussi bâtisseur, Joost Swarte confie par ailleurs réfléchir à la BD qu’il pourrait faire quand il travaille sur un projet d’architecture et réciproquement. « La ville est le décor naturel de la BD« , dit-il.
« Depuis une bonne dizaine d’années, la BD est plus angoissée, les super-héros ont disparu, souvent remplacés par des anti-héros. On contemple une ville angoissante et oppressante, comme dans les mangas ou chez François Schuiten« , note M. de Mazières.
Au total, 150 auteurs internationaux et 350 œuvres pourront être découverts par les visiteurs.
Infos pratiques
« Archi et BD, la ville dessinée » – Cité de l’architecture et du patrimoine – Palais de Chaillot 75016 Paris – du 9 juin au 28 novembre 2010.