Qualifier Gonin (1995) de simple film de Yakuza serait réducteur. Le cinéaste japonais Takashi Ishii s’adonne à une contorsion de styles alliant violence sèche et émotion, et jongle de l’univers sombre des yakuza aux portraits d’hommes des plus communs.
Bandai, un ancien chanteur à succès est propriétaire d’une boîte de nuit. Il croule sous les dettes et doit de l’argent à des yakuzas qui se font de plus en plus insistant. Pour se sortir de cette situation, il fomente un braquage. La cible : les yakuzas. Il réunit autour de lui quatre individus venant d’horizon différent…
Gonin est un petit polar d’ambiance. D’office, Takashi Ishii impose du style à son œuvre. A travers une maîtrise technique, le cinéaste créé un univers particulier amenant tour à tour l’angoisse, le suspense, la noirceur, l’action mais aussi et surtout le drame. Si le démarrage est lent, l’intérêt trouve son point de mire à l’instant du braquage, lorsqu’une effervescence se créé des suites du succès de leur manigance. Mais ce moment de répit sera de courte duré, laissant place à la désillusion lorsqu’ils comprennent que leur coup est loin d’être sans suite… A partir de cet instant, le cinéaste s’adonne à un mélange des genres, tel une démonstration de maître, Takeshi Ishii, s’essaie avec brio à composer des ambiances toutes aussi saisissantes les unes que les autres, se révélant surtout éprouvante. Le cinéaste parvient ainsi à communiquer l’inquiétude qui suit nos protagonistes seconde par seconde. Du salary man, père de famille et son retour macabre au foyer à l’ex-flic déchu au restaurant avec femme et enfant dans une atmosphère qui en une seconde devient menaçante (mécanique sonore) en passant par la relation ambiguë entre Bandai et le gigolo à fleur de peau interprété par Masahiro Motoki (Departures, 2008).
Gonin nous livre une palette d’émotion comme rarement rencontrée. Par le biais de ces portraits de pieds nickelés, Takeshi Ishii instaure une émotion particulière qui happe littéralement le spectateur. Car ces hommes dépeints, malgré leur manigance controversé ne font qu’agir par instinct de survie. Gonin est un film beau, marquant une expérience cinématographie singulière, de part son atmosphère et ces personnages à la fois particulier et si commun. Un film sombre où la tragédie accompagne ces hommes dans une fresque à l’onirisme obscur. Takeshi Ishii signe un long métrage complexe dont il est difficile de retranscrire toute la densité. Peu importe, l’intensité est là, la qualité aussi, Gonin est un grand film.
Diana & I.D.
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