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La Loi et la coutume

Par Amaury Piedfer

Toute société a ses règles, c’est bien entendu. Du point de vue anthropologique, un groupe humain se constitue pour assurer la défense des individus contre les menaces naturelles ou humaines, bien plus que pour la subsistance qui n’implique pas, ni pour la prédation ni pour l’agriculture, d’action commune élargie au-delà d’un petit cercle de type familial ou tribal ; il se perpétue grâce au maintien d’habitudes et de normes de comportement, qui forment peu à peu, au fil du temps puis des générations la spécificité du groupe. Ces normes de comportement sont énoncées comme telles ou non, elles sont durables ou non, mais sont irréductibles.

Eviter l'éclatement du groupe
Avec l’élargissement du groupe et surtout la diversification des activités, des intérêts particuliers, et la constitution de sous-ensembles, les normes se dissocient entre celles qui s’imposent à l’ensemble du groupe, et celles qui ne sont mises en œuvre, vécues, que par une partie. Les normes de la première série, les normes générales, font souvent l’objet de tentatives de mise en forme, d’une détermination explicite, qui évite l’éclatement du groupe soumis aux forces centripètes des sous-ensembles ; celles de la seconde série, les normes particulières ou privées, ne sont explicitées que dès lors qu’elles sont perçues comme mettant en jeu l’ensemble de la communauté ou encore quand leur intégrité est menacée. Ainsi, dans la Rome du début du IIème siècle av. J.-C., Caton l’Ancien, alors censeur et ainsi responsable de la cura morum (préservation des mœurs), limite le faste des banquets et impose des restrictions pour la parure des dames, parce que les normes, dans ces domaines, étaient en train de changer et que ces changements étaient perçus comme menaçant le groupe, en l’occurrence la cité.
Peu à peu, se dissocient donc fondamentalement deux sortes de normes, les normes explicites, objet de toute l’attention et des discussions publiques, celles soumises à des tensions et qu’il faut contrôler ; les normes vécues, celles qui s’imposent d’elles-mêmes et qui ne sont pas l’objet de discussion. Chez les Latins, c’est toute la distinction entre lex et mos, chez les Grecs, entre nomos et thesmos ; chez nos ancêtres les Français, entre loi et coutume.
Dès lors, il apparaît qu’une société qui fonctionne bien, c’est-à-dire un groupe dont la raison d’être se perpétue et dont les membres se reconnaissent comme redevables du groupe, se fonde avant tout sur le mos ou coutume : les habitudes ne sont pas le lieu de tensions, de remises en cause et n’ont pas à être explicitement formulées et défendues ; au contraire, une société qui se dérègle, qui change vite, a besoin sans arrêt d’avoir recours à la lex ou loi, pour réguler ses contradictions internes.

c’est-à-dire un groupe dont la raison d’être se perpétue et dont les membres se reconnaissent comme redevables du groupe, se fonde avant tout sur le mos ou coutume : les habitudes ne sont pas le lieu de tensions, de remises en cause et n’ont pas à être explicitement formulées et défendues ; au contraire, une société qui se dérègle, qui change vite, a besoin sans arrêt d’avoir recours à la lex ou loi, pour réguler ses contradictions internes.

Normes de comportement
La coutume apparaît ainsi, au sein d’un groupe donné, comme des usages, une série de normes de comportement, tacitement admises, héritées sans être véritablement l’objet d’un enseignement, par mimétisme ou bien induite par les structures sociales. Le comportement de l’allogène (celui qui n’appartient pas au groupe), sera ainsi évalué en fonction de sa capacité à se conformer à la coutume, toute incapacité dans ce domaine lui donnant un caractère repoussant ; l’audace du métèque, dans la vision qu’en a le groupe, découle de sa parfaite ou partiale ignorance de ces usages, ou de leur mépris. Et dans la pratique, les usages des autres, on en fait parfois peu de cas, comme le montre le comportement des touristes, qui se « lâchent » souvent, car ne ils ressentent plus la pression de la communauté et sont sortis de leur structures sociales habituelles et normalisante. Qu’on nous pardonne cette plaisanterie : notre président serait la parfaite illustration de ce type de comportements, lui qui fait sauter tous les usages de bienséance attachés à la fonction présidentielle, sous couvert de « modernité ». Mégalomanie, certainement ; sentiment d’inclusion dans la communauté nationale resté partiel, peut-être aussi.
En définitive, qu’est-ce que la coutume aujourd’hui en France ?

Si, bien sûr, ça existe encore. Des traces. Mais quand la cohérence de la société décline, quand les hommes se supportent à grand peine (l’idéologie du « vivre ensemble » cache bien mal un grand malaise), quand les mœurs ne sont plus l’objet d’un consensus, bref, quand la coutume est sapée, dévalorisée, ignorée et même désormais parfaitement oubliée, alors il ne reste plus que la Loi ; alors la loi s’emballe, on légifère à tout va, dans tous les domaines, jusqu’à l’absurde parfois (on condamne des mots, des gestes, on détermine la vie quotidienne dans ses moindres détails). Mais vainement, car la Loi seule ne peut rien. Elle ne devrait être qu’un mince squelette qui précise la coutume, qui condamne les déviants, et qui règle les désaccords au sein du groupe. « Nul n’est censé ignorer la Loi », précise le Code civil français. Nos lois envahissantes ne peuvent qu’être méconnues, puisqu’elles viennent du sommet vers la base, toujours plus nombreuses, toujours plus difficiles à faire comprendre, entendre et accepter par une population qui n’a plus de sens commun.
Quand on ne sait plus se tenir, il est vain de croire que la Loi nous tiendra.
Les autoproclamés « bien-pensants » qui détruisirent la coutume sociale, soutenus par ceux qui, idéologues et dogmatiques, dans l’ombre ou plus ouvertement, ne manquent jamais une occasion de déraciner plus encore les peuples « archaïques », ne représentent en rien l’avenir de l’humanité, comme ils affectent de le croire ou de le faire croire ; ils sont tout simplement la fin de l’Europe.
La logique de notre société abandonne l’individu dans la solitude, le laissant seul face à l’Etat et face au Marché, le perd dans une masse humaine froide comme un suaire, mais l’enveloppe aussi de lois, des lois qui se veulent protectrices, mais qui sont terriblement étouffantes, tristes suppléantes à la normativité communautaire. Abandonné, perdu, étouffé : tel est l’homo occidentalis.

Amaury Piedfer


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LES COMMENTAIRES (3)

Par Kopukiki
posté le 16 février à 16:52
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j'aiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiime

Par dan
posté le 14 janvier à 15:13
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slu j'aimerais beaucoup que vous m'aidiez à mieux traiter le sujet sur les rapports qui existent entre la loi et la coutume s'il vous plait.

Par willi
posté le 21 janvier à 14:13
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besoin d'aide pour un devoir sur les lois et les coutumes

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