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Hitchcock: Freud goes to Hollywood

Publié le 07 juin 2010 par Mojorisin

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Quel est le point commun entre le langage pop et les films de Hitchcock ? Tous deux fonctionnent comme un rêve, ou un cauchemar, en enrobant leur message d’une histoire tout à fait secondaire. Le contenu manifeste cache par son récit le contenu latent de manière inconsciente dans le processus onirique, alors que le réalisateur le construit tout à fait volontairement dans ses films. L’esthétique habille ainsi le sens d’un songe dont le message n’ose apparaître directement. N’avez vous jamais remarqué toutes ces incohérences qui parcourent la plupart des thrillers et qui pourtant ne nous ne empêchent de les savourer ? Car derrière ces histoires criminelles se cachent souvent des obsessions bien profondes et des intentions cachées.

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Pour comprendre Hitchcock il faut comprendre Hollywood. Considérer la capitale du cinéma comme une vulgaire usine produisant des divertissements en série reviendrait à réduire le tout à quelques unes de ses parties. Les américains n’appréhendent pas le savoir, ni le transmettent, de la même façon que nous autres européens. La scission entre culture savante et populaire demeure bien moins marquée là-bas, ce qui se retrouve au niveau du cinéma. Selon ses canons, le cinéma DOIT demeurer un divertissement, ce qui ne l’empêche pas de disséminer dans ses œuvres de nombreux champs de réflexion inspirés par la philosophie, la littérature ou la psychanalyse !

C’est justement ce qu’entreprit sir Alfred tout au long de sa carrière dont les plus grands continuent de s’inspirer. Amateur de littérature policière, et particulièrement d’Edgar Poe, il en connaissait parfaitement les rouages. Un meurtre, une énigme, une jolie femme, un détective, Hitchcock respectait le cahier des charges exigées par ce genre cinématographique afin de réaliser un divertissement populaire.

Cependant s’en tenir aux règles le cantonnerait au simple statut de « bon réalisateur » et ne justifierait aucunement son statut d’icône. Son coup de maître réside dans le contenu latent de ses films, habilement camouflé par de multiples références symboliques. Le maître, comme tout humain, ne faisait pas l’économie de névroses, ni d’obsessions, toutes reconnaissables au fil de ses oeuvres. Hitchcock fut un enfant obèse ayant nourri à l’égard de sa mère, et de l’autorité en générale, un sentiment de défiance extrêmement persistant. Solitaire, Alfred ne connut pas la jeunesse d’un playboy et nourrit à cet égard une certaine frustration perceptible tout au long de son oeuvre. L’innocent accusé à tort (La Mort aux Trousses, Le Faux Coupable…), la femme voilant sa part d’ombre derrière une blondeur angélique (Sueurs Froides, Psychose…), et la mère autoritaire sont des figures récurrentes de l’univers Hitchcockien qui renvoient à la symbolique freudienne et font de ses films de véritables productions psychologiques.

Alfred Hitchcock's Notorious screenshot
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L’intrigue principale ne devient donc qu’un prétexte pour aborder des sujets nettement plus élaborés comme le complexe d’Oedipe, le refoulement, le fantasme ou le désir. Hitchcock nommait MacGuffin l’élément initiant le scénario mais qui au final se révélait sans importance. « Dans les histoires de voleur, c’est presque toujours le collier et dans les histoires d’espionnage c’est fatalement le document. » Bref encore et toujours un prétexte pour parler de choses plus sérieuses sans ne jamais laisser l’humour de côté. L’esthétisme prend donc le pas sur le réalisme et l’œuvre se déchiffre comme un rêve dont elle s'inspire dans sa structuration. Car plus un film est réaliste, plus la marge d’interprétation se réduit, ce que comprit le maître du suspens en innovant les visuels grâce à des techniques particulièrement originales (le fameux travelling compensé dans Vertigo par exemple). Utiliser la culture populaire pour parler de choses savantes, utiliser le film policier pour parler de psychanalyse, Hitchcock ne s’embarrassa pas des frontières qui cloisonnent les genres et transposa la science du fauteuil jusqu'aux studios californiens.

Lorsque Hollywood rencontre Freud, il ne reste plus qu’à s’allonger et savourer la démonstration. Toujours moins chère qu’un psy, et plus divertissante.

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