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Sévère de Régis Jauffret

Par Ngiroux

Sévère de Régis JauffretUn préambule remarquable de l’auteur qui sait capter notre attention immédiatement «Je m’enfonce dans un crime.  Je le visite, je le photographie, je le filme, je l’enregistre, je le mixe, je le falsifie.  Je suis romancier, je mens comme un meurtrier.  Je ne respecte ni vivants, ni morts, ni leur réputation, ni la morale.  Surtout pas la morale.»  Sévère nous raconte un crime passionnel, tiré d’un fait vécu à Genève en 2005, Cécile Brossard est jugée et condamnée à huit et demi de prison, pour le meurtre d’Édouard Stern, riche financier.

C’est avec des phrases courtes, nerveuses, percutantes, incisives, crues, allant droit au but que la narratrice, l’amante, la secrétaire sexuelle, la meurtrière nous relatent cette liaison amoureuse intercalée de sadomasochisme, de fantasmes érotiques complètement débridés avec ce richissime banquier.

  D’un va-et-vient incessant entre le passé, le présent, entre le réel, le rêve, cette femme se découvre à nous : Je ne conseille à personne d’avoir un jour mon enfance.  Même une meurtrière ne le mérite pas.  Mon père avait un sexe et je le voyais souvent. Ma sœur ne l’intéressait pas, je l’enviais d’être laide. Et ce hasard qui changera son parcours : Je l’ai rencontré un soir de printemps.  Je suis devenue sa maîtresse.  Je lui offert la combinaison en latex qu’il portait le jour de sa mort.  Je lui ai servi de secrétaire sexuelle.  Il m’a initié au maniement d’armes.

« Je ne l’avais pas tué. J’avais inventé ce souvenir pour me faire peur.»

 Fuite en Australie, dénie, l’auteur du crime finalement avoue : Je l’ai soulagée d’une vie brillante et noire comme la laque de son catafalque.  Une vie de prédateur, dont le cynisme faisait l’admiration de la presse économique prompte à s’agenouiller devant les crapules qui engraissent leur capital de spéculations.

«Je savais que j’avais commis un crime d’amour.  On pouvait simplement me reprocher de l’avoir trop aimé.»

Un roman dans la même veine d’In cold Blood de Capote ou L’adversaire de Carrère, inspiré de célèbres procès, pour n’en nommer que quelques-uns.  Mais Jauffret nous offre ici un peu plus, un roman plus compact, plus concis. Le crime dans les pensées les plus intimes de la coupable. Une version très originale par le psychique de la narratrice.



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