Tous les ans, à pareille époque, on les sort de leurs ghettos, de leurs foyers, de leurs cocons familiaux. On leur facilite le souffle, la parole, l'accès. Tous les ans, on leur donne quarante huit heures pour rassembler des dons. Ils envahissent les plateaux de télé. On leur découvre des vertus télégéniques. On leur accorde le prime time mais avec une date d'expiration très courte, comme leur souffle, comme leurs gestes mesurés. Et le reste de l'année? - On les range avec les décors de noël, les sacs à sapin qui n'ont pas servi; entre parenthèses, les maladies orphelines, les insuffisances de moyens, l'intégration en milieu ordinaire. Tous les ans, on ouvre son porte monnaie, on met la main à la poche, on essuie une larme, deux larmes quand la croissance est là. Quelle est la part de ces dons généreux qui revient à la recherche scientifique, qui aide au quotidien ces personnes atteintes de myopathie et de maladies orphelines? Tous les ans, on nous sert le même discours comme pour le cancer: on est sur le point de trouver, la recherche avance à grand pas, vous êtes formidable! Mais qu'en est-il vraiment de ce business téléthonien? - Est-ce vraiment prioritaire d'investir dans une boîte de production audiovisuelle, de dépenser des budgets faramineux dans la com? Tout cela nous fait penser à ces véhicules flambants neufs de certaines ONG qui circulent à tombeau ouvert dans des zones dévastées, ne s'arrêtant qu'au soleil, bien dans le viseur des photographes. Arrêtons cette hypocrisie et engageons les réformes nécessaires pour que cette mascarade télévisuelle n'ait plus de raison d'être.
Philippe Barraqué
© 2007 – Philippe Barraqué/Cesarina Moresi – Blog Handi t’es pas cap – Tous droits réservés. Consultez la certification IDDN : InterDeposit Digital Number