Rappelons, tout d'abord, sur quel fondement juridique Le Ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux a été condamné par le Tribunal correctionnel de Paris, ce vendredi 4 juin.
La loi de 1881, article 29 prévoit que l’infraction d'injure est réelle quand elle est « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait ».
Cet article a été élargi au réseau électronique, puisque l’injure est signalée telle quand elle est « commise envers les particuliers par le biais d’un réseau électronique et non précédée de provocations ». Elle est punie d’une amende de 12 000 euros selon les articles 23, 32 et 33
S’il s’agit d’une diffamation et d’une injure publique à caractère discriminatoire, la sanction est plus lourde quand l’injure a été effectuée vis-à-vis d’une personne ou d’un groupe de personnes eu égard à l’origine, l’appartenance à une ethnie, à une nation, à une nation ou à une religion ou encore une injure en fonction du sexe, d’une orientation sexuelle ou d’un handicap.
L’injure doit être publique et la peine encourue est d’un an de prison et de 45 000 euros d’amende pour diffamation, et de 6 mois de prison et de 22 500 euros d’amende pour une injure
Puis, rappelons les faits qui ont valu cette poursuite à Brice Hortefeux devant la XVII chambre correctionnelle, à l'initiative du MRAP : en septembre 2009, une vidéo tournée à de l'université d'été de l'UMP à Seignosse, puis, diffusée sur Internet, avait beaucoup choqué.
Sur les images, une militante expliquait à Brice Hortefeux qu'Amine, jeune militant d'origine alégérienne, mangeait du cochon et buvait de la bière.
Ce à quoi le ministre répondait : « Ah mais ça ne va pas du tout, alors, il ne correspond pas du tout au prototype ».
Puis, il ajoutait : « Il en faut toujours un. Quand il y en a un, ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes ».
Si la XVII chambre correctionnelle de Paris, Présidée par Joël Boyer, a relaxé Brice Hortefeux pour la première phrase énoncée, elle l'a condamné, pour la seconde, à 750 €uros d'amende ainsi qu'à 2.000 €uros de dommages et intérêts.
Décision dont il a immédiatement fait appel.
Dans ce dossier, quelque chose me choque.
Ce n'est pas la décision, ni la volonté de faire appel du Ministre. La justice se déroule, la justice tranchera.
Non, ce qui me trouble, comme un blogueur de Libération, Medhi Ouraoui, dont je reprendrai les mots, c'est "l'insupportable caution de l'UMP et du Gouvernement", au sujet de l'affaire Hortefeux.
Au lieu de faire profil bas et de tirer les leçons de cette condamnation, l'UMP et le Gouvernement apportent un soutien indéfectible à ce ministre, pourtant garant de l'ordre.
François Fillon, Xavier Bertrand et consorts prennent une lourde responsabilité en soutenant Brice Hortefeux, sans avoir, jamais, à aucun moment, témoigné une quelconque réprobation pour de tels propos.
Comment ne pas percevoir un signal d'impunité craché ouvertement au visage des citoyens ?
Surtout lorsque dans le même temps, de nombreux élus UMP dérapent, dans l'indifférence généralisée.
Je suis un défenseur de la liberté d'expression, et m'élève contre la répression systématique des mots. Néanmoins, je juge dégradant pour l'honneur de la République que de plus en plus de dirigeants se permettent de stigmatiser des communautés, d'être condamnés, et de ne subir aucune réprobation politique.
Pendant ce temps, en Grande Bretagne, les Ministres ont suffisamment d'honneur pour démissionner en raison de notes de frais indûment perçues.
Le parti socialiste a exigé la démission de Brice Hortefeux.
Si la justice française, après l'usage des voies de recours légalement prévues, confirme cette décision, une issue différente de la démission ne me paraîtrait pas envisageable.
Dans une République conservant un reste de dignité, ce serait naturel.....
Car c'est la seule et unique fois qu'un de ses Ministres est condamné pour un délit de cette nature.
Par John Bastardi Daumont
publié sur Le blog de John Bastardi Daumont