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Regard en arrière

Publié le 06 juin 2010 par Lonewolf

Il est des événements qui marquent une vie. Des périodes, des situations, il restera marqué ce changement de décennie au plus profond de moi.
Tout au long de notre vie on se cherche, on se questionne, on nous épaule, on nous guide, on nous accompagne, on nous oriente.
On prend vite l’habitude de s’appuyer sur tout et n’importe quoi. Notre famille, nos amis, nos croyances, nos rêves.
Les valeurs auxquelles on nous fait adhérer ou croire. Tout ce qui peut nous servir de béquille. En fait nous ne marchons pas durant notre vie, nous nous trainons de béquille en béquille.
Parfois un coup de folie, on prend des libertés, mais on revient presque toujours à nos si rassurantes béquilles.

Mais en fait comme dans certains soins, on devrait non pas se raccrocher à ce qui nous entoure, mais parfois lâcher complètement et tenter d’avancer par nous même.
Comme l’enfant qui découvre que marcher peut se faire debout, lâcher ce qui nous garde levé, quitte à tomber, après tout ça n’est pas si grave on risque quoi?
La vie n’est qu’un vaste terrain de jeu dont on n’explore pas l’étendue simplement par peur, peur de s’éloigner du mur, de la rambarde, de la canne.
C’est bien facile de dire ça tant qu’on se tient à quelque chose, ça l’est moins quand on est par terre, tentant de se relever, sous les quolibets de ceux qui jamais ne ferons un pas en dehors du chemin qu’ils se sont tracés.
C’est plus facile aussi, de ne pas croire qu’ailleurs la liberté ouvre des mondes à explorer, et d’être de ceux qui moquent et qui montrent du doigt.

Comme un château de cartes, la vie est incertaine, en équilibre instable, à l’affut du moindre souffle d’air, on essaye de se protéger. Mais en est-on capable?
Si d’un coup nos béquilles viennent à tomber, si la rambarde semble disparaitre, si tous les repères qu’on avait précieusement mémorisé se trouvaient envolés, comme une mandala soufflé par le vent, le sable s’éparpillant l’image vient à disparaitre, on perd tout en un instant.
Que faire dans un pareil moment, se laisser tomber, ne plus bouger, pleurer sur sa vie, sur soi, sans aucun espoir de jamais se relever. Regarder les autres autours passer sur leurs béquilles, comme dans la rue, devant un homme assis au coin d’un commerce, sans un regard, sans un signe, sans un sourire.
Juste des mots, de la calomnie, le jugement de ses pairs qui pourraient être là à notre place. Ou alors se lever, tituber, tomber, se raccrocher à tout, à n’importe quoi, mais le lâcher aussitôt.
Tenter de trouver un équilibre même précaire, même instable. Poser un pied, un nouveau pas, essayer, se risquer, trébucher, se relever, encore et encore, pas après pas, voir se dessiner au sol une multitude de chemins.
De routes qui s’ouvrent vers ces lieux que ces autres ne découvriront jamais. Prendre confiance, assurance, et se rendre compte que ce qu’on nous apprend, ce qu’on nous inculque, ce qu’on nous promet n’est rien d’autre que chaines et liens fait pour nous tenir dans "le droit chemin"…

La découverte du monde est l’expérience la plus douloureuse qui soit, peut être est ce pour nous en protéger qu’on nous canalise dans un chemin dans un lit, comme la rivière, qu’on essaye de nous maintenir là où ça semble être le plus "correct" le moins dur.
Mais en fait c’est aussi là que c’est le moins enrichissant, que c’est le moins palpitant, c’est dans le lit de la rivière que les choses sont les plus tranquilles, certains diraient normales.
Quand je regarde en arrière je vois encore mes béquilles sur le sol, je vois le chemin que je suivais, rassurant, comme un appel, mais mon sourire n’est pas mélancolique, point de tristesse de m’en être écarté, les béquilles ont cassés, je suis tombé, et maintenant je vois toutes ces routes, tout ces possibles.
Tous ces devenirs qui s’offrent à moi et que j’ai encore tellement peur de saisir, de vivre, encore quelques chaines et quelques liens qui me maintiennent à cette rambarde, mais le temps les érodent, le temps et le fait que je tire, m’éloignant un peu plus chaque jour de ce chemin tout tracé.
Créant mon propre chemin, c’est ça la vie, prendre le risque de se perdre et de ne jamais plus retrouver un chemin qui soit dans la norme de la multitude, mais le vivre avec intensité, et surtout ne jamais avoir l’impression d’avoir raté quoi que ce soit dans sa vie.

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