En ce début de moi de mai, la presse a aussi la tête à la finale : impossible de passer à côté de 2012. Et impossible de passer à côté de DSK. A la faveur de la crise grecque, le patron du FMI est devenu l'homme providentiel pour un bon nombre de journaux, en témoignent les unes de Libération, du Parisien et de l'Express. Une biographie lui est consacrée aussi, publiée par l'anonyme Cassandre et à qui les "éditocrates" réclament de tomber le masque.
Soit dit en passant, Heinrich Heine a écrit un jour que "là où on brûle des livres, on finit aussi par brûler des hommes". Jeter un livre à la poubelle au motif que son auteur souhaite rester anonyme relève à mon sens de la même démarche quand le geste est scénarisé et exécuté dans une émission de divertissement, à une heure de grande écoute.
"Serez-vous candidat à la présidentielle ?"
Mais revenons à 2012. Outre DSK, Martine Aubry, François Bayrou, et un certain nombre de personnalités de droite sont elles aussi soumises à la question qui rythme désormais les interviews du matin : "Serez-vous candidat à la présidentielle ?". Certains objecteront que c'est la logique des institutions, que les politiques eux mêmes ne vivent que pour cette échéance quand bien même ils s'en défendraient. Certes, mais jusqu'à preuve du contraire, ce n'est pas encore le rôle des hommes politiques de fixer l'agenda médiatique, ni de rédiger les questions des journalistes.
Il y a quelques jours, Daniel Schneidermann pointait du doigt la dérive d'un journalisme convenu, qui ne dérange pas, qui relate sans objecter, qui pose les questions attendues. Il y opposait le fact-checking cher aux équipes de Yann Barthes, qui fouillent les archives, qui confrontent les promesses aux résultats et qui dérangent en bousculant les codes. L'une des deux formes finirait par "terrasser" l'autre selon les termes de Schneidermann.
Selon moi, le "journalisme de papa" comme je l'appelle connaît ses dernières heures et finira par disparaître quand les audiences ne suivront plus. Autrement dit quand les Français auront compris sa vacuité. Le renouvellement du "mode de consommation" de l'information, avec l'apparition de pure players infos qui disposent de davantage de libertés, acculera les médias dits classiques à innover. A cet égard, la télévision et la radio sont plus menacés que la presse écrite. Pourquoi ? Parce que la logique d'instantanéité du Net concurrence davantage à mon sens les radios et chaînes infos que les journaux.
Mais qu'importe, aujourd'hui les journalistes ont la tête à la finale. Seul importe le nom des candidats qui s'affronteront en 2012, voire celui des deux qui se qualifieront pour le second tour, au risque d'oublier que l'agenda politique est chargé d'ici là et qu'il peut nous réserver bien des surprises. Et si les journalistes politiques étaient finalement en train de rater leur match ?
"Dites que je réfléchis"
Du côté de la classe politique, si l'on fait mine de s'offusquer des questions sur la présidentielle, il faut bien reconnaître que les partis s'y préparent déjà. A l'UMP par exemple, les premières conventions pour le projet ont commencé. Alain Juppé a fait savoir sa disponibilité si une quelconque défaillance de Nicolas Sarkozy l'empêchait de briguer un second mandat. C'est que le parti tout entier a été structuré autour de cette échéance. UMP n'était-il pas au départ l'acronyme d'Union pour une Majorité Présidentielle ? Ainsi depuis 2002, l'UMP a constamment la tête à la finale, au risque de voir sacrifiées les échéances intermédiaires telles que les régionales, les municipales ou encore les européennes.
Quant à Dominique Strauss-Kahn, le patron du FMI laisse entendre à ses proches et amis qu'il pourrait être tenté par l'aventure présidentielle. Selon Libération, l'éternel candidat aurait réuni au mois de février ses partisans dans un restaurant parisien. Le mot d'ordre ? "Si on vous pose la question (sur 2012, ndlr), dites que je réfléchis". Et comme un bonheur ne vient jamais seul, un sondage BVA et Image et Stratégie le sacre cette semaine "candidat socialiste préféré des Français" .
Dominique Strauss-Kahn peut-il se laisser griser par la présidentielle au risque de rater la sortie de crise ? Le risque est grand et Laurent Mauduit bien malicieux souligne déjà sur Médiapart que le patron du FMI est le grand coordinateur du plan d'aide à la Grèce. Un plan qui astreint le pays au régime sec. Pourra-t-il dans ces conditions revenir jouer la partition sociale que le Parti Socialiste s'est mis en tête de composer ?
Pour revenir au PSG, les joueurs de Kombouaré me direz-vous ont malgré tout remporté la Coupe de France. Côté cour, le club a donc sauvé sa saison et disputera la Ligue Europa l'an prochain. Un lot de consolation qui n'efface pas des performances en dents de scie tout au long de l'année. Car côté jardin, le PSG est classé 11e au championnat, derrière Valenciennes et Monaco. Et les ambitions de l'entraîneur ont dû être revues à la baisse.
Sauver les apparences, c'est assurément l'exercice auxquels seront condamnés bon nombre de candidats après l'élection de 2012. Je suis davantage inquiète pour les journalistes qui n'ont d'autre choix que de se ressaisir pour sauver leur peau.