Il faut la liberté, le recul et l’intelligence d’un grand peintre, Eduardo Arroyo, pour déclarer dans Le Monde :
« Il y avait un respect qu’on n’imagine pas aujourd’hui, avec ces conneries qui sont venues ensuite, cet art « émergent » qui ne danse qu’un été, avec la complicité d’une bande de types qui ont perdu la cervelle, galeries, curateurs, bureaucrates. Le monde artistique actuel est répugnant, un Barnum insupportablement idiot. Et l’Etat, alors, ne s’occupait pas d’art. »
Oui, il y a les artistes et journaleux de circonstance, les sans talents qui usent de la facilité et de la fausse provocation - qu’ils s’appellent Fabrice Hybert ou Emmanuelle Lequeux... Mais la liste est interminable!
Mais il y a tous ces artistes humbles et lumineux, tant d’artistes de la « figuration narrative », de « support-surface », des artistes tels que Rebeyrolle ou Philippe Cognée et des journalistes éclairés tels que Olivier Cena ou Philippe Dagen qui savent, plutôt que d’user de la langue de bois et du cire pompes, écrire dans la distance sereine nécessaire à la contemplation de l’œuvre.
Il se trouve que ces gens qui cherchent, qui doutent sont ceux qui trouvent.
Et le plus souvent, ce sont eux qui sont les plus doués d’attention et d’humanité. Philippe Dagen, dans le Monde Magazine daté d’aujourd’hui , évoque sa rencontre avec Louise Bourgeois, cette maison qui semble avoir eu sur lui le même effet que j’évoquais dans mon dernier billet : un lieu sombre et peu hospitalier. Et comme tous ceux qui l’ont approchée, il ne peut faire l’impasse sur l’aigreur et le sadisme du personnage.
Inutile d’en rajouter si ce n’est que ces collisions dans l’actualité de l’art soulignent combien le champ artistique est devenu flou, incertain, comme si le Tout culturel et le Tout artistique n’étaient rien d’autre qu’un piège asphyxiant et la Culture et l’Art.
Heureusement, partout, s’agitent quelques fourmis qui, là écrivent un superbe texte dans l’intimité d’un cercle réduit, là présentent une exposition où chaque pièce est un ravissement pour le cœur et l'esprit.
Tout ceci, le plus souvent hors des grands médias et surtout pas dans « Beaux Arts Magazine » !
Mais plutôt les découvre-t-on au hasard d’une rencontre, par une conversation ou dans ces errances qui vous mènent là où toute reste à défricher ou à déchiffrer, où l’on devient l’éclaireur de soi-même à la lumière de l’œuvre aimée.