Suite du 1er juin ...
Ce culte phallique de la fécondité par des représentations du pénis en érection se retrouve dans toutes les civilisations et à toutes les époques, des poteries suggestives du Pérou aux estampes japonaises, en passant par les statues érotiques des tombes malgaches, les statues des temples de l'Inde, les illustrations des traités chinois. Partout des pierres dressées sont l'objet de pèlerinages pour les femmes qui désirent un enfant et viennent embrasser ou caresser le symbole phallique, ou le renflement de la statue du saint censé guérir les stérilités. Des fêtes où l'on présente des pains, ou des objets tressés, en forme de sexe existent toujours en certains points d'Europe.
De l'invention de la braguette à celle du Viagra
Les humains ont aussi cherché à mettre en valeur le sexe mâle. Chez les peuples nus, le sexe au repos, peu avantageux, est inséré dans des étuis péniens bien plus volumineux qui ne peuvent qu'attirer les regards. En Europe, le Moyen Âge invente la braguette, d'abord pièce d'étoffe très colorée, souvent rembourrée, qui signale sur le corps la place de ce qui reste caché, mais dont on ne peut plus ignorer la présence.
Au XIXe siècle, on commence par rire de la manie de voir des phallus dans tous les objets dressés (Flaubert, Bouvard et Pécuchet), ce qui n'empêche pas Freud de théoriser sérieusement sur cette omniprésence du phallus et son lien avec le pouvoir mâle. Au XXe siècle, nous sommes toujours dans une période de pénis triomphant, où l'on pense que c'est la verge qui fait l'homme mâle.
Pourtant déjà les Romains savaient que c'étaient les testicules qui conditionnaient la fécondation, et les riches romaines castraient leurs beaux esclaves afin d'avoir des rapports sans risque de grossesse. Aujourd'hui, malgré toutes les connaissances hormonales et génétiques, c'est la présence ou non d'un pénis de taille suffisante pour être distingué d'un clitoris qui fera choisir le sexe d'un enfant en cas d'ambiguïté sexuelle. Le pénis a historiquement triomphé de la vulve, qu'il a reléguée au second plan. La récente évolution de la condition féminine vers plus d'égalité le remettait à sa juste place, comme un des éléments du plaisir sexuel et de la fécondation, rôles qu'il doit apprendre à partager. Les nouveaux médicaments des troubles de l'érection risquent de lui redonner une trop grande confiance en lui, en éliminant la peur des défaillances, et le conforter dans sa volonté de domination sans partage.