Ouf ! Nicolas Sarkozy commence enfin à comprendre qu'il est temps de gouverner et pas seulement de battre des bras. Il a récemment fait en sorte qu'on ne puisse plus voter d'adjonctions au budget en dehors du temps consacré à la loi de finances. Le voilà qui prend à bras le corps les retraites. Et puis je viens d'apprendre qu'il serait prêt à renoncer à la suppression de la publicité à la télévision.
Ne nous réjouissons pas : les solutions proposées sont toujours décevantes voire mauvaises, mais au moins, on commence à traiter les vrais problèmes. Il demeure néanmoins du grand n'importe quoi (taux d'encadrement des crèches, dégradation considérable des conditions d'enseignement) dans les choix opérés.
De toutes façons, avec une menace sur notre notation sur les marchés, risquant de fléchir de AAA à AA+, il est clair que nous n'avons plus le choix.
Il n'en reste pas moins que je n'adhère toujours pas à la méthode : le but ne devrait pas d'être en soi de raboter toutes les dépenses sans discernement mais de redéfinir le domaine d'intervention de l'État.
Je m'explique avec l'exemple de la santé. J'ai toujours été favorable aux franchises médicales. Aucun soin ne devrait être entièrement gratuit, mais tout le monde doit pouvoir se soigner. Je préfère que l'on paie une franchise de deux à trois euros par acte mais que l'investissement dans la formation médicale soit maintenu : autrement dit, que l'on continue à dégager les fonds nécessaires, au Ministère de l'Éducation Nationale, pour former des pédiatres, des orl, des neurologues, des pédo-psychiatres, des gynécologues, bref, toutes ces spécialités de médecine qui sont menacées.
Mon raisonnement est simple : les franchises sont réversibles le jour où la prospérité est revenue ; la disparition de spécialités médicales ne l'est que fort difficilement et avec un sacrifice d'une génération au moins.
C'est ce type d'arbitrages que j'attends. Autre exemple : le réseau postier coûte cher ; pourquoi ne pas mettre en place une délégation de service public dans les supérettes des petits bourgs ruraux, ce qui engagerait les petits commerces à y rester, au demeurant (ils toucheraient une part des bénéfices), ce qui coûterait bien moins cher.
Troisième exemple : la multiplication des gratuités de la culture à tout va est une erreur ; pire : l'art ne devrait jamais être gratuit. Et de toutes façons, il ne l'est pas puisque l'impôt paie la facture. L'État pourrait s'en tenir à une fonction de sauvegarde du patrimoine et demander pour tout accès à un bien culturel, automatiquement une participation même si elle est faible ; les étudiants peuvent très bien payer un ou deux euros l'entrée d'un musée, par exemple.
Est-ce également à l'état de favoriser l'accès aux restaurants ? Je ne le crois pas. Ce ne sont pas des emplois délocalisables et l'état n'a pas vocation à se substituer au panier de la ménagère sauf par de l'aide alimentaire d'urgence pour des familles très en difficulté. Le restaurant ne rentre pas dans ce cadre. Il faudrait donc revenir sur la baisse de TVA consentie, d'autant qu'elle n'a rien amené en termes d'emplois.
Je ne suis pas un spécialiste, mais plutôt que de menacer l'avenir comme s'apprête à le faire un Luc Châtel, avec forcément l'aval de Nicolas Sarkozy et François Fillon, mieux vaudrait entamer une réflexion de fond sur ce que l'on garde ou non en France.