Misteur Valaire... un nouveau modèle économique!!!

Publié le 02 juin 2010 par Yannpapas
Je vous ai parlé à de nombreuses reprises de Misteur Valaire, ce groupe d'électro-jazz québécois que j'ai découvert l'année dernière au FestiVoix et que je kiffe à donf.
Cela fait presque un an que je les suis et je ne me lasse pas de leurs aventures, comme aux J.O. de Vancouver en février. A cette occasion, ils ont fait une série de vidéos terribles qu'on peut visionner sur la chaine YouTube BlogueMV. MV comme Misteur Valaire...
Leur première spécificité, c'est qu'ils sont complètement barrés mais éminemment sympathiques. Pour vous en convaincre, voici une entrevue avec le groupe lors de son passage en France en septembre dernier :

Leur deuxième caractéristique c'est le modèle économique qu'ils ont choisi d'adopter en renonçant à la majeure partie des revenus traditionnels liés à la vente de la musique. Le groupe s'auto-produit et concentre ses activités sur la vente d'une gamme très large de produits et surtout de services parmi lesquels la vente traditionnelle de disques "physiques" est plutôt marginale.
Voici comment se répartit leur chiffre d’affaire en 2009 :
. Spectacles (concerts, télés, web) : 56 %
. Produit dérivés (t-shirts, posters…) : 16 %
. Bourses, subventions et dons : 14 %
. Éditions (droits radio, synchro, pub, films…) : 8 %
. Disques physiques (en magasins) : 4 %
. Disques numériques : 1 %
Etonnant, non ?
Depuis sa création, Misteur Valaire offre sa musique à ses fans par l'intermédiaire du Web. Leur deuxième album, Friterday Night, sorti fin 2007, a été téléchargé par plus de 46 000 internautes à ce jour (dont votre serviteur). Vous pouvez toujours le télécharger ici.
Cet album a finalement été mis en vente en magasin en mars 2009, 18 mois après son lancement. Il s'est vendu à 800 exemplaires en 2009 et continue sur sa lancée avec environ 18 copies vendues par mois. Ce qui est honnête quand on pense qu'il est encore téléchargeable gratuitement.
Tous les internautes qui téléchargent l'album laissent leur adresse courriel et viennent enrichir, de ce fait, la base de contacts du groupe. Cette stratégie permet à MV de parler directement à ses fans, de développer un lien privilégier avec eux et ainsi, fait économiser au groupe des milliers de dollars de dépenses promotionnelles.
La diffusion gratuite de leur musique permet à MV d'accéder à une bonne notoriété. Le groupe remplit les salles de concert. Le live est une activité dans laquelle MV excelle et qu'il considère comme le cœur de son métier. Tout cela stimule également les ventes de produits dérivés.
Pour son troisième opus, Golden Bombay, MV a creusé un peu plus son approche marketing. Le lancement de l'album a eu lieu le mardi 18 mai au Club Soda, à Montréal.
Voici une vidéo de cette soirée :

Avant le lancement, plusieurs packs étaient proposés aux fans en pré-vente. Pour 35 $ (27 €), 629 personnes ont pu assister au concert de lancement de l'album, obtenir les mp3 de Golden Bombay, deux semaines avant sa sortie officielle, récupérer l’album en format physique le soir du concert-lancement au Club Soda. Certains ont même pu continuer la fête lors de l’after-party, jusqu’au petit matin.
En plus de ces 629 chanceux, 129 autres ont acheté le forfait à 25 $ (réception de l’album par la poste le lendemain du lancement en plus du mp3), et encore 74 ont payé 15 $ (mp3 de l'album seulement). Si ça c'est pas créatif...
A partir du lancement officiel de l'album, MV a choisi d’adopter la stratégie que Radiohead avait privilégiée en 2007 ; celle de vendre (ou donner) la musique (numérique) en laissant les internautes choisir la somme qu'ils souhaitent payer.
Et les résultats sont très intéressants.
Durant les 120 heures qui ont suivi le lancement de Golden Bombay, soit du 18 au 23 mai inclus, 1 346 copies numériques de l'album se sont envolées via Internet. Le fan de MV a payé en moyenne 2,99 $ (2,3 €) par copie téléchargée. Si l'on exclut les 60% qui n'ont rien donné en échange des tounes, le prix moyen de ceux qui ont payé est de 7,52 $ (5,8 €). Dans cette même période, ce dernier opus s’est vendu à 1 798 exemplaires physiques, se plaçant ainsi en 3ième position des ventes d'album en magasin au Québec et en 22ième au Canada.

Il est sans doute un peu tôt pour en tirer des conclusions radicales mais j'ai envie de dire aux grosses maisons de l'industrie du disque qu'elles devraient essayer de faire preuve d'un peu d'imagination plutôt que de se plaindre en permanence de la chute des ventes de CD et de tout mettre sur le dos du téléchargement illégal sur le Web.

Bien sûr que le téléchargement en est partiellement responsable mais il faut vivre avec son temps ; et peut-on réellement lutter en votant de lois inapplicables comme Hadopi ? Bien sûr que non, il faut anticiper, innover, être créatif, réfléchir quoi... Et dans ce domaine, Misteur Valaire semble bien plus doué que les services marketing des majors.

Si ce sujet vous intéresse, je vous recommande d'aller faire un tour sur le blogue de Guillaume Déziel, initiateur de la stratégie Web de Misteur Valaire et notamment de lire son article sur la commercialisation de la musique et son devenir.

Je vais terminer en musique, comme d'hab, avec l'extrait d'un live de Misteur Valaire à Sherbrooke, leur ville d'origine, sur lequel on peut se rendre compte de l'énergie dégagée en concert :

J'espère avoir l'occasion de les revoir. En attendant, je vous recommande de faire comme moi si vous en voulez d'avantage. Allez faire un tour sur le site de Bande à Part, 55 minutes de concert vous y attendent.