En Russie, les militants LGBT ont enfin pu tenir une Gay Pride à Moscou, sans arrestations par la Police.
Mais la marche n’a duré que cinq minutes.
En effet défiant des autorités moscovites, les gays et lesbiennes ont réussi le 29 mai 2010, pour la première fois à organiser brièvement et sans incident une Gay Pride dans Moscou, au terme d'une partie de cache-cache avec la Police anti-émeute et grâce à une logistique "paramilitaire".
Pour cette cinquième Moscow Pride, interdite comme les précédentes par Iouri Loujkov, le maire ouvertement homophobe, les défenseurs des droits des homosexuels étaient déterminés à éviter la confrontation, ainsi que les arrestations et les coups qui ont coutume de l'accompagner.
Annoncée de longue date, la journée avait pourtant mal commencé: vers 10h, les abords de la station de métro où le rendez-vous avait discrètement été donné aux journalistes grouillaient déjà de policiers anti-émeute prêts à intervenir.
En revanche, aucun militant gay n'était en vue.
Forts de leur expérience, les organisateurs ont par la suite fait savoir qu'ils n'avaient jamais envisagé de mener l'action à cet endroit.
Mais ils ont aussi reconnu ne pas avoir prévu que le jeu de cache-cache qui s'en est suivi occuperait militants, policiers et journalistes pendant toute la matinée, pour se solder par une Gay Pride d'à peine cinq minutes.
Louis-Georges Tin, militant français, fondateur de la Journée mondiale contre l'homophobie et la transphobie, venu spécialement à Moscou, a expliqué "Les années précédentes, la Police avait réussi à nous pister. (…) On joue au chat et à la souris mais nous, nous sommes agiles comme des souris et malins comme des chats".
Il souligne "C'est paradoxal: pour un événement pacifique, nous sommes obligés d'avoir une organisation paramilitaire".
En effet de nombreux journalistes venus couvrir l'événement ont été déconcertés par le jeu de piste dans lequel ils se sont retrouvés embarqués et qui les a entraînés successivement sur un parking de supermarché en banlieue, puis dans un long trajet en minibus sur le périphérique extérieur avant enfin de revenir au centre ville, où la parade s'est finalement déroulée près de la gare de Belorouskaïa.
Cependant, les militants gays russes qui les menaient ont entretenu un savant mystère sur la suite des opérations.
Le défilé a vu l'apparition, à deux reprises, du principal organisateur de la parade, Nikolaï Alekseev, juché sur une moto dont le conducteur portait un masque et avait retourné la plaque d'immatriculation.
Il s'est excusé pour les conditions singulières dans lesquelles se déroulait la parade, selon lui rendue nécessaires par l'interdiction abusive des autorités et la nécessité de protéger les militants.
Il a déclaré sur le parking, avant de repartir sur sa moto, "Nous voulons crier nos slogans, nous ne voulons pas juste montrer une bagarre de plus dans le centre de Moscou".
Après environ quatre heures de partie de cache-cache, les journalistes ont finalement pu gagner au pas de gymnastique le lieu de la Moscow Pride qui fut assez modeste.
Elle se résuma à une trentaine de jeunes militants au pas de course qui portaient un long drapeau aux couleurs de l'arc-en-ciel et scandaient des slogans comme "L'homophobie est une maladie" ou "La Russie sans homophobes".
Ils portaient aussi des pancartes proclamant "Des droits pour les gays" ou "C'est mon choix".
Mais à peine au bout de quelques minutes et de 200 mètres de parcours, l'"opération commando" a été déclarée terminée.
Les militants ont replié à la hâte leur drapeau avant de se disperser.
Ils ont gagné la partie de cache-cache puisque la Police n'est arrivée sur place que dix minutes plus tard et n’a pu faire aucune arrestation.
Louis-Georges Tin a déclaré après le défilé, "C'est une grande victoire. Certes, le maire de Moscou avait interdit la marche, mais ce n'est pas M. Lujkov qui va dire aux citoyens russes s'ils ont le droit d'être libres ou non!"
Nikolaï Alekseev s’est quant à lui, déclaré satisfait, soulignant que son objectif, c'est-à-dire "montrer que les gays et lesbiennes peuvent défiler pacifiquement dans cette ville" était atteint.
Seigneur, protège nos sœurs et frères homosexuels persécutés.