Frieze, donc, ce week-end, comme je l'avais promis jeudi dernier dans l'éphéméride.
Mon plaisir des foires est toujours insatiable. Mais là où je sens que je commence à me faire vieille, c’est que je m’aperçois que je ne cède plus autant à la fascination. Dès que j’ai repéré les Julian Opie, les Jason Martin et autres Liam Gillick, ils sortent aussitôt de mon champ visuel.
(image: Julian Opie; courtesy Lisson Gallery, Londres)
J’imagine qu’ils sont là pour rassurer les collectionneurs (« oui oui on est bien dans une grande foire ») — je suppose qu’il en existe encore qui souhaitent en acquérir (même si je ne vois pas très bien où sont l’agrément et l’excitation : appartenir à la coterie des collectionneurs qui possèdent un Jason Martin? probablement ; investir dans une valeur sûre ? peut-être).
Quelques tendances, nées depuis peu, et déjà insupportables :
-les films 8 ou 16 mm, que ce soit à Frieze ou dans les foires off : ce ne sont pas vraiment les films par eux-mêmes qui sont agaçants, c'est plutôt qu'il semblait obligé qu'à chaque coin de stand, on entende la machine émettre son petit vrombissement.
-la peinture-collage, qui superpose graphiquement des univers différents. Le procédé conduit parfois à un véritable élargissement visuel. Mais le plus souvent, c’est seulement un procédé.
-les oiseaux, les feuillages, les chouettes et les cerfs : eux, ils persistent et signent. Les cerfs, cela fait depuis au moins 3 ou 4 ans. En même temps, c’est une véritable lame de fond, intéressante à envisager en tant que telle. Mais parfois, ces thèmes sont seuls destinés à rendre compte de l’inconscient, de l’étrange, de l’effrayant, de nos archétypes, d’un paradis perdu, etc. N’y aurait-il qu’eux ? (Tiens, Isaac dit à peu près la même chose, ici)
-je ne reparlerai pas des paillettes (en lente voie d’extinction), ni des crânes (le motif le plus représenté au monde, et cela ne risque pas de s’arrêter, je le crains : façon aisée pour l’artiste de se dédouaner de l’obligation d’un engagement envers la condition humaine).
Alors trève de ce qui m’a agacée. Les découvertes :
- Douglas White (chez Paradise Now, à Londres, qui présentait un stand à Zoo). Oui, encore des motifs nocturnes, oui, encore des caissons (bien qu’ils aient diminué ces temps-ci), oui, des éléments façons cabinet de curiosité (le it-thème de la saison).
Mais son travail n’était pas sans présenter des effets intéressants : la simplicité et l’évidence des motif, l'élégance de la présentation, une identité visuelle forte.
Visiblement, le (plutôt) jeune artiste avait bien vendu (Images: courtesy Paradise Now, Londres)
- J'ai noté aussi, à Frieze, l'étonnant Anthony Goicolea, qui pratique autant la photo que la peinture (grand format) et la vidéo.
(images courtesy Aurel Scheibler Galerie, Berlin)
- Et comme un précédent commentateur nous parlait de décors (et des critères qui peuvent décider un critique d'art à affirmer d'une peinture qu'elle n'est pas seulement une belle toile de fond), je vous livre ici quelques vues du travail de Mathilde Rosier, dont le travail sur papier (elle fait aussi de la vidéo et de la photographie) se présente souvent sous l'aspect d'installations posées comme un décor de théâtre.
Représentée à Paris par la galerie Zürcher, elle était ici montrée sur le stand de Iris Kadel (Karlsruhe).