Commence la soirée avec Plimplim, inconnu au bataillon et à priori dj chronique bordelais. Lumière bleue, debout face à son computer, il pourrait très bien s'appeler Alain, 32 ans et invité de l'émission Confessions intimes parce qu'il ferait passer le tuning avant sa vie. Pourtant rien de tout cela. D'une installation ultra moderne, un simple Vaio relié par un jack épais comme un pouce à une boîte à effets du plus bel effet, Plimplim puisqu'il s'appelle comme ça agit en fait en tant qu'explorateur sonore. Aérien et captivant le petit homme si ordinaire explore en click 'n cut des mélodies minimales auquelles il ajoute des touches de synthèses numériques. Jamais l'ambiant électronique n'a atteint telle qualité dans la course de l'humanisation des machines. BO parfaite d' A.I. de Spielberg, la musique de ce probable geek étonne et absorbe.
A peine remis de cet encart électronique, je me plais à commenter la chance que j'ai ce soir de pouvoir assister à 25 mètres du pas de ma porte, dans une salle à taille et tarif humains, au concert d'un des groupes anglais les plus intéressants de leur génération, le tout dans le quasi anonymat. Ce sont surtout des fans qui remplissent le Son'art ce soir jusqu'à la gueule. Gravenhurst donc, groupe de Bristol au sud ouest de l'Angleterre emmené par Nick Talbot, ancien leader des Assembly communications. En pleine tournée de leur dernier LP The western lands (en rapport avec un bouquin de Burroughs sorti en 1986), Gravenhurst vient débaler son incroyable capacité à brouiller les pistes, jonglant d'un premier album carrément folk à un second limite post rock, Fires in distant buildings.
Aux premières notes des nouvelles chansons, la patte de Nick est toujours présente, un songwritting impeccable, un son précieux et des envolées électriques profondément mélancoliques. Ce qu'on sait moins c'est que Gravenhurst jouit en live d'une force insoupçonnée: la présence au sein du groupe du batteur Dave Collingwood qui apporte une section rythmique démentielle. Et le folk mélancolique à la Nick Drake que l'on croyait connaître de muer en un véritable show shoegaze, ni plus ni moins. Tête dans le guidon, Gravenhurst alterne les ballades et les tourbillons électriques turbulents. Plus encore, le groupe en live donne la part belle aux morceaux instrumentaux noisy post rock et dansent sur le terrain de My Bloody Valentine et The Jesus and Mary chain.
Pas de véritable surprise sur la playlist, Hollow men et Trust, les deux premiers single du dernier opus, Saints, nouveau titre très efficace également, et puis Velvet cell évidemment, le tube nirvanesque du précédent album. Dans la plus pure tradition anglosaxonne, le plus américain des groupes anglais n'a jamais été aussi calme et violent à la fois, nageant entre classissime éthéré et secousses sismiques déglinguées.
Traditionnellement, Nick talbot termine ses concerts par un passage solo voix / guitare incontournable et c'est là que l'on comprend vraiment qui est la tête pensante de ce groupe. Décontracté, sobre et juvénile, comme un ange au timbre fluet. Les arpèges et paroles de Tunnel, I turn my face to the forest ou Black holes in the hand sont tous simplement magnifiques. Le cercle d'inconditionnels présent ce soir a même droit à une discussion avec Nick qui grand prince laisse choisir les ultimes morceaux par les fans eux-mêmes. Sombre, maîtrisé, mélancolique et dément dans son espace sonique, Gravenhurst vient de grimper de nombreuses places dans ma groupographie idéale.
Ne manquez pas cette formidable vidéo réalisée par les Concerts à emporter, Nick Talbot en solo à la guitare au fond d'une ruelle, magique :