Excipit.Voilà! Il nous faut quitter ce « héros » sympathique et immature, fuyant, attribuant la responsabilité de ses actes souvent auto-destructeurs à ses boucs émissaires préférés. Dieu le diable ou quelconque manipulateur aux intentions insondables.Il serait utile et charitable de faire preuve à son égard d'un peu de compassion et lui glisser à l'oreille que la nature reste la plus forte et le hasard fait ce qu'il veut.« il n'y a pas de récompenses ou de punitions, il n'y a que des conséquences. »
La ville assoupie subit l'ondée d'avril. Des tourbillons venteux font des embruns pénétrants jusqu'aux os.
L'étrange inconnu relève le col de son Burberry's en tournant à l'angle de la Vieille Tour et arrondit les épaules sous la Porte Dijeaux. L'homme sans cou s'éloigne entre les pages d'un LéoMalet un blues de Jonas dans la tête
Atmosphère polar à 4 heures du matin. La ville déserte est un spectacle coloré par son humeur aigrie et maussade.
Le boulanger de la rue Brochon n'a plus rien à pétrir mais tout à décongeler. L'escroc embauchera dans deux heures. Un soupirail soupire sans autre alternative, un clodo profite de sa chaleur gratuite.
L'ersatz de Nestor Burma pense au petit lapin blanc de tout à l'heure et à l'annonce que lui a faite Miranda:Miranda demain se marie.
Revoir Miranda fut une bonne mauvaise surprise comme en réserve la vie quand le hasard empoigne le guidon. Quand il se croisèrent il sut dans son regard sa chance de retrouver l'amour intact qui l'avait fait fuir une première fois. Quel maître à l'étrange cohérence utilise l'alibi opportun des intersections improbable pour sa stratégie mystérieuse?
Bon , là il l'avait un peu aidé le hasard. Revenant d'un périple sportif en Espagne sur un tronçon du chemin de Compostelle en pleine restructuration affective, il s'était souvenu deMiranda comme d'une bonne adresse. Ensuite il n'avait plus eu qu'a croiser son chemin sur son trajet travail. La très stable et solide Miranda n'avait ni changé de boulot ni ses habitudes piétonnes et le « hasard » fit le reste.Miranda l'aime toujours. Miranda l'aime encore. Lui, le fuyard en pleine peine des meurtrissures déclinantes de sa dernière dérobade.Miranda, pourtant et malgré tout demain se marie avec un homme qui n'a pas le temps de perdre son temps. D'un sourire d'amertume pour saluer dignement ce sort décidément farceur il accepta l'offrande de la dernière nuit. Pour l'heure, elle gémit. Ses cheveux font des volutes entre ses épaules et coulent sur l'oreiller. La tête dans le traversin, accroupie les genoux sur les coussins dans une posture pornographique de grenouille stéatopyge offrant, au centre de la cible, une bague intime à son doigt sans ongle au pays de Sodome sans Gomorrhe.
C'est son cadeau d'adieu. Elle ranima de sa bouche sa raideur fléchissant à l'accueil de cette nouvelle doublement douloureuse et il lui fallu deux traits de coke pour retrouver l'indispensable rigidité. Il aperçut surpris un lapin blanc tatoués au creux de ses reins avant de basculer dans le plaisir inconnu et violent.
A StChristoly, un carnassier mécanique et géophage casse la croûte les dents plantées dans le goudron. Interrompu par la nuit, il éventrera demain la chaussée sous prétexte de travaux publics. Des éboueurs interrompus par la pause cassent la graine autour d'une quille de rouge.
L'inconnu soupire sur l'âme humaine en général et féminine si particulière. Il a peu de compassion pour ses compagnons de voyage, passagers du vaisseau terrestre qui abordera tout à l'heure aux rives du soleil.
Sans lui!
Il pense à son aîné, qui a dix huit ans ayant déjà compris que l'amour était une maladie mentale et vivant mal la rupture de son premier et unique amour avait précipité sa Renault cinq contre le mur du centre commercial de StMédard. La mode n'avait pas encore des obligations de air bag et la colonne de direction avait percé son cœur, déjà bien meurtri par la flèche de Cupidon.
Son âme aigrie se rebelle, malgré la joie de ses fibres, et inclue dans sa détestation aussi les objets: Un restaurant fermé, des chaises qui patientent les quatre fers en l'air sur des tables complaisantes, lui épargne le spectacle des manducations inutiles.
Pas mieux pour les hommes:
Derrière les façades, les ventres repus d'anciens rebelles demi indigné, semi soumis du peuple émasculé, discipliné, horizontal et raisonnable reposent flatulents et ronflants dans des rêves ordinaires d'écran plat ou de 4X4. Des catins légitimes ronronnent prés d'eux alourdies et rassasiées de leur dévotions conjugales.
Il y a dans leur ciel des bonheurs réussit et des plaisirs qui passent et reviennent comme des oiseaux migrateurs tous les vendredi soir.
L'adultère, dont Miranda ne veut pas, comporte cependant plus de sincérité et de désirs véritables que la sexualité rituelle. La vérité, souvent, est nichée au cœur du mensonge.
Il s'abrite par hasard sous l'encorbellement qui avance dans la rue Louis de Jabrun. Sous le mascaron d'une porte cochère il aperçoit intrigué, le deuxième lapin blanc!
Une bicyclette agonise, innocente prisonnière d'un réverbère complice d'un antivol. Les lampadaires perfusent la lumière vitale dans les artères de la ville exsangues de chalands en attendant le jour. Malgré les efforts des halogènes, la clarté jaunâtre fait des ronds autour des poubelles éventrées où festoient les greffiers. Devant la cour Mably une armée imaginaire d'un seigneur de la guerre enterrée debout affleure la surface, les semelles des jumelles Weston patinent sur les casques de soldats luisants comme des pavés.
Les vitrines renvoient une image de GeneKelly muet et triste sur le glacis entre le Régent et le Grand Théâtre. Le miroir fendu des dalles quadrillées reflète les douze muses du frontispice dessiné par Gabriel. Le ciel referme ses paupières de nuages.Cours Xavier Arnozan, un immeuble se souvient du fantôme d'Haussman.
Derrière un mur,
Pour le meilleur ou le pire,
il y a un sommier qui gémit,
un ange qui soupire,
un homme qui s'épanche,
un arbre qui se penche
sous le vent qui forcit.
La colonne des Girondins dans son dos, est un hommage aux députés du tiers état et non pas une stèle pour des milliardaires en short. Il chemine entre les statues de Montaigne et Montesquieu Elles ont la posture majestueuse, drapées dans des toges et la mine offusquée par la fiente des rats volants sur leur perruque de pierre, la miction des fêtards noctambules et les déjections canines sur leur piédestal . Elles patientent dignement entre le départ des forains de la foire aux plaisirs et l'ouverture de la brocante St Fort. Il franchit haletant et humide le portail imaginaire des colonnes rostrales.
Voilà déjà La Garonne et le troisième lapin blanc taggué sur le parapet de la pile onze du pont.
Tout à l'heure, Miranda aura la bague au doigt!
Et lui conserve à jamais autour de son membre la brûlure de la sienne. Dernier visa sur son passeport de voyageur lubrique.
Le piéton libertin songe aux instants de l'existence, parfois chanson dont on n' écrit pas les paroles, pas plus que la musique.
Ou comme tantôt, opéra
chef d'orchestre Miranda.
A elle la maîtrise du livret, et de la partition.
Nulle décision pour la naissance et si peu sur le cour de la vie, les maladies, les joies, les rencontres, les voyages pas toujours sages. Le hasard, ou un lapin blanc, s'est chargé de sa destiné et s'est joué de ses apparentes actions le leurrant sur leurs incidences factices. Parfois quelques réussites éphémères l'ont enflé d'importance.
Trop de chansonnettes, si peu d'opéra, des jours sans chansons, des nuits sans musique!
Le grand final, lui, se décide par la manière et le moment. Le royaume faste de certitudes contre un domaine étriqué de l'aléatoire.
Il n'a pas envie d' humer une autre parfum, de savourer une autre liqueur que la cyprine de Miranda. De connaître un autre plaisir vulgaire, commun et faire de ce premier, le dernier, l'unique absolu.
Il se penche. Le garde corps offense sa poitrine. Il regarde au loin l'estuaire vers Pauillac et plus loin vers l'embouchure. Un vent marin lui apporte l'embrun véritable, de sel et d'iode.
Le touriste de Sodome est fasciné par le maelström en dessous comme par la spirale sans fin d'un hypnotiseur. Il subodore le léviathan qui l'attend.
L'inconnu, fatigué des blancheurs nocturnes succédant sans répit aux diurnes noirceurs qui lui font l'esprit embrumé entre la lâcheté de l'illusion et le courage d'espérer, se dit qu'il est temps de fuir. La signalétique du lapin blanc est là opportunément et fidèle au poste. L'autre nuit, un cauchemar s'était dans un micro sommeil d'un quart d'heure. Il était un insecte englué dans la toile. L'action pour s'en dépêtrer n'était en réalité qu'un agitation sans autre utilité que d'attirer la prédatrice. Limpide! Sa psychologie sommaire donnait à l'interprétation une lisibilité effrayante Autant écrire soi-même le scénario du pire et user de son droit d'auteur sur sa propre existence. Genre: anticipation.La bande son de Jonas a laissé la place à Paolo Conté: "Unagelatti al lemon".
Son chant des Sirènes!
Glacée c'est probable, saveur citron c'est moins sûr :
Bras en croix, tête jetée en arrière, poitrine offerte: Le saut de l'ange.
Il plonge pour vérifier!Le pacte.
Satan:
-« il s'en est bien tiré à Barcelone.Dieu:-t'avais un peu forcé le trait avec ta combustion spontanée.-S:Ma justice: le poids de la culpabilité et la brulure de la responsabilité.-D:il méritait une seconde chance!-S:tu lui a offert sept vies. Il en a fait sept péchés capitaux.-D: six! Il n'est pas avaricieux.-S: parce que tu ne l'as pas fait riche.-D:La schizophrénie, c'était ton idée.-S:...et le lapin blanc, la tienne.-D:tu t'en ais un peu servi avec toutes ces fausses pistes qui lui ont fait croire en sa chance.-S:un vieux truc: une succession de modestes et bonnes fortunes pour endormir sa paranoïa, satisfaire sa suffisance et entretenir l'illusion de l' invulnérabilité.-D:tu as joué la naïveté contre l'espoir .-S:.... en lui laissant son libre arbitre.-D:Tu ne trouves pas que l'on se ressemble?-Satan:comme le bien et le mal. Tu me le donne?-Dieu:il est à toi!»Les épaules secouées d'un frisson, l'inconnu ne peut voir dans son dos Martin qui arrive.Martin Dodousse va vers la mer!Aujourd'hui, Martin le capitaine du "Breuil", remonte à vide vers Pauillac pour charger le tronçon d'A 380 et le déposera à Langon pour un périple qui se terminera par la route jusqu'à Toulouse. Il est en avance sur la marée.Troisième d'une génération de mariniers son grand-père menait les gabarres en Dordogne de Castillon à Libourne chargées de barriques de vin Clairet ou du "cassou," la pierre du Lot. Le métier, transmis par son père, avait bien failli disparaître quand les péniches remplacèrent les gabarres et les moteurs, les vieux gréements.Il fallut la construction de l'Airbus et les aménagements du fleuve pour que la profession perdure pour quelques privilégiés avec les deux barges aménagées: "Le Breuil" et "le Brion".
Martin aborde l'arche aménagée entre les piles dix et douze du pont de Pierre. L' hélice mue par les 1100 ch du diesel tribord, contrarie les tourbillons. L'électronique compense le couple de renversement qui "tire" à bâbord. L'étrave apparaît à l'amont sous la pile du pont lorsque la poupe s'engage sous l'arche en aval.Dans cette phase délicate pour un marin d'eaux douces, Martin concentre sa vision sur l'antenne, une pointe érigée à la proue comme un viseur.Il voit un ange sans ailes et sans auréole, poitrine offerte, bras écartés, s'embrocher sur son fanal puis il perçoit un bruit immonde accompagnant le geyser rouge qui jaillit du torse déchiré et se termine en gargouillis."Encore un coup du lapin blanc" songe - t- il! Indifférent, cynique et contrarié, il observe que le frimeur, bien inspiré par les ondines, a plongé plutôt que sauté: Mieux vaut l' amant de la sirène qu'un sodomite empalé comme figure de proue!Martin, retardé, ne verra pas la mer et le candidat à la noyade refusé par les néréides, agonise sur sa broche.Tout à l'heure, Martin-le-taggeur ira effacer tous SES lapins blancs qui ne l'amuse plus."Tant pis pour ce prétentieux" pense-t-il en guise d'épitaphe, de toutes façons, on ne décide pas de sa mort à la place de ThanatosLe père et le fils touché par la flèche de Cupidon, la vindicte de dieu ou la vengeance du démon, qu'importe! cette (sainte) initiative est le dernier volet du triptyque et l'acteur ultime de la trinité.No one Bordeaux le 28 mai 2010