Poeme de Sonia cheniti : La nuit Kroumirie

Par Illusionperdu @IllusionPerdu

Toute la nuit Kroumirie a possédé les chênes,
la nuit Kroumirie, intacte et haute, et son passé
plein de rivalités humaines
et de prestiges effacés.


Les monts chevauchent, pacifiques, formidables,
et leurs épaulements, chevelus de forêts
portent le brouillard blanc, né de marais
gonflés de pourriture entre des bancs de sable.


Son baiser cotonneux, au goût de vase et d'algue,
engourdit la contrée et prend, sans volupté,
ses yeux d'eau vive, clairs et froids comme une dague,
et ses cheveux de myrte embaumé par l'été.


Aux plis des monts cambrés, tels des corps haletants
sous le désir d'Eros disperse et divinise,
dans l'amas de ses fougères, portant
leur âpre odeur d'amour, d'humus, d'ombre et d'église,


la nuit, délice obscur, plein d'irréalité,
la nuit Kroumirie, sans embûches ni rapines,
berce une patiente et vieille humanité
entre ses mains de feuilles vertes et d'épines…