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Platonov au tribunal

Publié le 29 mai 2010 par Anthonynaar
Platonov au tribunal
Je viens de regarder le reportage d’Envoyé Spécial sur le procès d’un violeur en série. Ce qui m’a particulièrement intéressé, c’est l’attitude du criminel. Pour résumer brièvement, si vous n’avez pas le temps de regarder le reportage en entier, il se lamente, reconnaît qu’il a fait du mal, s’excuse, et pleure.
Il pleure tout le long.
Particulièrement quand son demi-frère vient à la barre, lui lance ses quatre vérités en face, le violeur s’effondre, incapable de rester debout et de soutenir les accusations.
Ce qu’il dit en somme, c’est « oh seigneur, comme je regrette, comme je souffre d’avoir fait du mal ».
Ca me rappelle furieusement la pièce Platonov, du dramaturge russe Anton Tchekov. Dans cette pièce, Platonov est un instituteur aimé et respecté, qui va foutre sa vie en l’air en séduisant à peu près toutes les femmes qui passent à sa portée et en leur promettant à toute de partir avec elles, tout en répétant à sa femme qu’il l’aime. A force de promesse, certaines tombent dans la dépression, d’autres veulent se venger à coup de fusil, et Platonov, lui, passe le dernier acte à se lamenter sur combien il est malheureux. En clair, au lieu de se dire qu’il a merdé et qu’il devient urgent pour lui de tenter de réparer ce qui peut encore l’être, il se pose en victime de ce qui lui arrive.
Alors qu’il est le seul et unique responsable de ce qui lui arrive.
Bref, la même chose que dans ce procès, le violeur se lamente sur lui-même parce qu’il souffre des conséquences de ses actions.
Je me souviens qu’au lycée, quand j’ai exprimé le mépris que m’inspirait le personnage de Platonov, une camarade me dit que je méprisais tous ceux qui n’étaient pas comme moi.
Sans doute avait-elle raison. Mais et après ? Oui, je le reconnais sans problème, je n’ai que le plus grand mépris pour ceux qui, au lieu d’assumer les conséquences de leurs actes et de tenter de les réparer, se lamentent sur eux-mêmes.
Peut-être est-ce là la différence entre les hommes et les larves. Les hommes tentent de réparer leurs conneries, les larves se lamentent de ce qu’elles ont fait.
Sauf que ce qui pose problème dans cette histoire, c’est que le comportement de Platonov, au moins dans le quatrième acte, ne produise pas de façon générale et spontanée autre chose que du mépris. Alors que toute personne digne et droite devrait le trouver ridicule et avoir envie de lui coller une paire de baffe, nombreux sont ceux qui le plaignent.
C’est peut-être ça le malheur de notre époque en fait.
On préfère les larves aux hommes.

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