Le livre du jour : Cahier Roger Munier, éditions Le Temps qu'il fait

Par Florence Trocmé

La rubrique Livre du Jour ne propose pas de notes de lecture critiques mais met en valeur des livres récemment édités, en les présentant de façon un peu plus approfondie que dans le cadre de l’article hebdomadaire Poezibao a reçu.   
 
 Le livre 
Collectif 
Cahier Roger Munier 
Cahier dix-sept sous la direction de François Lallier et Jérôme Thélot.  
288 p. + 24 p. hors texte. 
Le Temps qu’il fait, 2010 
29,00 Euros 
Tirage de tête limité à 50 exemplaires numérotés accompagnés d’un film original de Patrick Zeyen 
( Roger Munier, le visiteur ) sur dvd ( 56 minutes ) : — 55,00 Euros 
Présentation de ce Cahier 
Le présent volume entreprend de reconnaître l’œuvre et la pensée de Roger Munier, en leur champ d’action et leur envergure. Philosophe, poète (ou encore critique, traducteur), aussi bien il récuse ces dénominations en son travail même, parce qu’elles dressent des barrières et croient définir ainsi des objets, quand il n’y a que des frontières, toujours franchies, et un seul objet, bien qu’il échappe sans cesse. Roger Munier occupe superbement celle qui se trace entre ontologie et phénoménologie – clairement soumises à une interrogation eckhartienne du divin. Il déplace avec non moins de force celles qui dessineraient le territoire de la poésie, exercice de la parole, écoute du monde. Ainsi aux « méditations » qui conduisent la pensée jusqu’au bout d’elle-même, répond le dire de l’Opus incertum, où s’actualise l’horizon d’une présence adossée au Rien. Proche des grands poètes de son temps, auteur d’un livre majeur sur Rimbaud, théoricien de l’image et ami des peintres de l’apparaître, témoin enfin de l’« espace intérieur », Roger Munier, dans l’écart où il se tient, met en relief d’un rayonnement oblique les questions que tend à occulter la représentation que notre temps se fait de lui-même.  
Au sommaire :  
textes de Gabrielle Althen, Soheil Azzam, Gérard Bocholier, Chantal Colomb-Guillaume, Yannick Courtel, Jean-Yves Debreuillle, Pierre Dubrunquez, Sébastien Hoët, Christian Hubin, Gilles Jourdan, Natacha Lafond, François Lallier, Isabelle Lebrat, Jacques Lèbre, Jacques Le Brun, Yves Leclair, Henri Mongis, Bruno Pinchard, Henri Raynal, Jacques Réda, Bertrand Saint-Sernin, Lionel Verdier, Patrick Zeyen ; peintures et dessins de Nasser Assar, Denise Esteban, Claude Garache, Bernard Gantner, Dominique Gutherz, Alexandre Hollan, Anne Neuve-Église, Julio Pomar, Alain Tirouflet, Jean-Max Toubeau. Inédits de Roger Munier. Iconographie, biographie, bibliographie complète. 
Une présentation de François Lallier 
"Tenter de prendre la mesure de l’œuvre de Roger Munier, dans son ampleur et son rayonnement, tel est le but que s’est fixé le présent livre. Roger Munier fut d’abord, il faut le rappeler, le traducteur, en 1953, de la Lettre sur l’humanisme de Heidegger. Dès 1949, il était allé interroger celui-ci. Plus tard, il le mettra en relation, à la demande de Jean Beaufret, avec René Char, et participera aux séminaires du Thor...." 
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un site dédié à Roger Munier 
Extraits  
 
  de Jacques Réda 
« Au fond entre ″poésie″ et″pensée″ – plus encore une pensée aussi étroitement attachée à l’énigme de ce qui est est en disparaissant – il n’ a de différence fondamentale que dans leur rapport avec le langage qui reste, même en définitive impuissant, un moyen d’élucidation pour la ″pensée″ et, pour la ″poésie″, le lieu d’une révélation.(p. 13) 
  de « En chemin », de Roger Munier : 
Ce qui n’est pas, ne sera pas, ne peut être, rôde au sein de ce qui est. Sa sourde rumeur parfois s’accorde avec le dénuement de ce qui est.  
Les nuages de neige, lourds et gris, sourdement menaçants, se défont en chute lente, paisible, virginale, silencieuse absolument.  
Ce n’est pas l’éclosion d’un sens mais seulement, ici ou là, fragilement, inespérément, quelque chose qui se dénoue. Parfois, de ce point limité, sur une plus vaste région étendant ses ondes.  
Je n’avais pas le mot, mais un geste pour le mot, que ne venait couvrir aucun mot.  
Ne pas expliquer en disant. Seulement dire.  
(pp. 65 à 68)