Etat chronique de poésie 900

Publié le 28 mai 2010 par Xavierlaine081

900

Lorsque par de mystérieuses actions, le silence s’impose, il reste à explorer ces rives de solitudes, puissantes et farouches qui ne délivrent de rien.

Que sont mots déposés, si nuls yeux ne peuvent s’y promener ?

*

C’est dans cette contrainte que le retrait prend toute sa saveur.

Fuir le monde tant qu’il en est temps. Ne plus se mêler à cette exubérance sordide, à cet affolement des sens qui nous détache toujours plus de notre état de nature.

Les infinies souffrances qui se déclinent au fil des heures ne sont que l’aboutissement d’un chemin réduit en impasse par les promoteurs du pire.

Et le pire, c’est ce mur apparemment infranchissable qui se dresse devant nos œillères, ne nous laissant rien entrevoir de la beauté.

*

Dans cet instant suspendu où rien ne se passe que l’inversion du souffle venu du large, l’esprit peut se blottir, vibrer de cette présence familière, puis se laisser submerger d’émotions à l’approche des flots roulants.

C’est l’heure d’entrer au port pour les uns, de rompre les amarres pour les autres. La nuit fourmille de ces lumières dressées à la proue des continents.

De frêles édifices marquent mal la présence des récifs.

Il faut sagesse entendre qui invite à demeurer dans la solitude hauturière.

Une étincelle parcourt l’échine des vagues.

Une brise nous pousse au frisson sous le ciré glacé d’embruns.

Des monstres nous guettent en des grottes secrètes.

L’écume resplendit dans un sourire de lune.

*

Nous voici à notre juste place.

Celle que nous ne devrions jamais quitter.

Celle qui nous fait mesurer notre intime fragilité, la force de notre amour, ultime refuge avant de sombrer dans l’oubli.

*

Qu’Anastasie fasse son ouvrage à grand coup de ciseaux, taillant dans nos voiles les croupières de ce monde, nous contraint à la remercier : elle nous place dans cet éloignement salutaire qui permet à la littérature hors pacotille de briller, bien plus et mieux.

Les mots ne peuvent se déguster que froids, patinés par les ans, peaufinés en travail d’orfèvre, dans le silence de l’atelier.

*

L’agitation gagne la ville.

La compagnie des mésanges s’égosille en vain.

Le vert frais qui drape le marronnier se dresse dans l’azur délicat.

Le temps se fait court aux doigts qui se cherchent, juste avant l’aube.

Tu te lèves, enfin et regarde autour de toi l’intensité de ce désert.

Nous joindrons nos solitudes pour boire à la source d’eau fraîche.

Nous y déposerons notre fardeau, juste avant de reprendre la route.

Manosque, 15 avril 2010

©CopyrightDepot.co 00045567