Ce qui aurait pu s’apparenter à une jolie sortie s’avère être au contraire une belle supercherie. Chronique d’un piège musical inattendu.
Le nom de Kool Sphere ne vous dit peut être pas grand-chose, mais il est probable que vous l’ayez aperçu dans ce clip à l’esthétique parfaite qu’est « Reality Check » produit par DJ Premier. La moitié de Verbal Threat, originaire de NYC après avoir sorti en 2009 quelques chutes de studio avec son très bon Unreleased Archives, nous livre ici son premier opus, adoubé au passage par Monsieur Premier. Un appui de poids alors que la concurrence se fait rude pour qui gardera le haut du pavé dans l’underground new yorkais.
Pour le moins que l’on puisse dire, Integritty avait tout pour plaire. Un MC vertueux, admirateur incontesté du golden age, incorruptible et intègre. Une tracklist séduisante, qui contient de gros calibres comme Lil’ Dap, Smooth Da Hustler, Kool G Rap ou AZ. Des choix artistiques qui tapent incontestablement à l’œil. Reste à voir ce que l’opus a dans le ventre. Ceci est une autre histoire…
Si la première écoute intégrale réjouit de part sa constance à la fois dans le fond et la forme, ce revival s’étiole à une vitesse folle. N’étant pas ce qu’on appelle dans le jargon « un bouffeur de mic », Kool Sphere paie cher son flow monotone face à des pointures plus exercées comme Smooth Da Hustler, AZ et surtout Kool G Rap. Difficile de lutter face à de tels monstres, il en deviendrait presque effacé. Le rappeur aurait pu s’en tenir à cette imprudence largement pardonnable, mais celui-ci semble se pousser lui même à l’erreur en présentant une ligne artistique qui s’avère fatale. Integritty se révèle alors être un ersatz de Primo, un « copier-coller » lamentable, doté d’un découpage à la limite du plagiat, illustré notamment par Weirdo sur « Stay True », « Blue Collar MC’s», « Serial Killa » et « Supply & Demand ». Ce manque flagrant d’originalité et de prise de risque diminue ainsi fortement l’intérêt porté à cet album dont le but est de satisfaire le puriste lambda. Seulement, à côté du travail effectué par le producteur de Gang Starr, les présentes productions font pâle figure. Car même dans l’imitation, la comparaison ne tient pas. Les trois quarts de l’opus étant du même acabit, reste à sauver le plus intéressant, c'est-à-dire peu de chose. Gardons simplement en tête cette balade jazz sur « Creative Control », le boom bap « Uncondtional » et l’enjoué « Steaks & Lobsters », vous obtiendrez un condensé honnête et déjà plus savoureux. Ironie du sort, seule la douce mélancolie des violons de « Reckless Eye-Ballin’ » produit par Bronze Nazareth et relégué au statut de bonus track, tire son épingle du jeu au milieu de cet amalgame surfait et vide de sens.
A l’heure où les revivals et les références aux 90’s sont légion, tout n’est pas bon à prendre. Encore faut-il savoir susciter un intérêt digne du genre sans avoir à calquer au drum près ce qui a été fait auparavant. Au final, Integritty est presque devenu sa propre caricature.