Ayant connu le souffle fade et rare de la terre
dans le vol inversé des branches appauvries
que jamais n’a hanté mésange ni lumière
et le poids du silence aux granges de poussière
où tous les blés du monde sont battus,
ayant ressuscité le septième jour,
rejoint mon corps béant comme une maison vide
où chaque hiver brise un linteau, fend une porte
pour les fêtes de mai au lierre et des ciguës,
j’ai pavoisé de linges les fenêtres,
armé le feu, puisé la force des citernes.
J’ai tiré de la nuit mon coeur, mes mains, ma bouche,
habité ces châteaux que traverse la foudre
et que je reconstruis aux pentes difficiles
et que je reconstruis,
ne sachant plus ce qui est mort en moi et ce qui vit.
(Jean Joubert)