Chronique du mardi 25 mai 2010.
Cela fait 2 week-ends qu’une équipe qui sort de 3 semaines de repos affronte une équipe qui a trop joué. Du coup, des matchs qui semblent pouvoir nous offrir ce qui se fait de mieux dans le rugby français, et donc européen, nous laissent sur notre faim. Certains diront que c’est la faute à pas de chance mais j’ai bien l’impression que l’on devrait revivre le même scénario l’année prochaine. Explications…
L’imbrication HCup/ Top14 n’est pas bon :
Que ce soit Perpignan face à Toulouse en demi-finale du Top14 ou Biarritz face à ces mêmes Toulousains, à chaque fois, l’équipe qui n’avait plus joué depuis 3 semaines a connu des hauts et des bas dans un match qu’elle ne pouvait totalement maîtriser. Bizarrement, Biarritz a dominé le début et la fin de match là, où, pour Perpignan, c’était plutôt le milieu. Mais à chaque fois ces équipes ont manqué de la maîtrise totale que l’on peut attendre d’elles en fin de saison. Et leur adversaire, Toulouse, n’a, lui non plus, pas offert son plus beau visage.
Les 2 matchs étaient frustrants dans le sens où on pouvait en espérer beaucoup plus en termes de jeu et d’organisation. La demi-finale du top14 encore plus que la finale de la HCup. Entre des Catalans qui ont commis beaucoup de fautes et des Toulousains la tête déjà tournée vers le match suivant, la rencontre ne s’est jamais totalement lancée et la frustration était grande de voir ces 2 équipes jouer à seulement 60% de leur possibilité. Et encore, pour Toulouse, c’était 60% des possibilités d’une équipe mixte. En ce qui concerne la finale de la HCup, il y a moins à dire. D’un côté les avants Toulousains ont eu suffisamment de ressources pour maîtriser la rencontre et, de l’autre, les joueurs Biarrots ont, eux, réussi à optimiser un potentiel qui est plus prés d’une 7ème place en Top14 que de celle de finaliste en HCup.
C’est vrai que dans les 2 cas, Perpignan et Biarritz, on a vu des joueurs qui avaient retrouvé de la fraîcheur physique et qui, grâce au travail physique effectué dans l’intervalle ont fait montre d’une explosivité presque de début de saison. Le problème, c’est que dans l’animation offensive et ses manques, on avait aussi l’impression de voir des matchs de début de saison. Et que, du coup, ce qui aurait du être un formidable combat, je pense là uniquement à la rencontre Perpignan – Toulouse, ne sera qu’un brouillon où le vainqueur était, de par l’impasse annoncée par Guy Novès, déjà quasiment connu avant le match. Quel gâchis ! L’affrontement entre le vainqueur du Top14 2009 et le vainqueur de la HCup 2010 méritait mieux, beaucoup mieux !
Et le pire, c’est que ce n’est pas fini ! Perpignan va jouer la finale, samedi prochain, en ayant joué seulement 2 matchs en 5 semaines. Les Catalans ont certainement l’impression d’avoir fait le plus dur, battre Toulouse après un arrêt de 3 semaines, mais c’est lors de la finale que ces coupures risquent de se voir le plus. Face à un adversaire qui aura eu une coupure d’une semaine après avoir enchaîné les matchs, les Catalans vont certainement souffrir d’un manque de rythme et de ces automatismes qui fonctionnaient si bien lors de la fin des matchs de saison régulière. Et, cette fois, il ne faudra pas compter sur l’impasse faite sur le match par son adversaire. Enfin, je ne pense pas, Clermont devrait tout donner dans la bataille, et même plus… Et la logique implacable du sport de haut niveau devrait faire que les Catalans vont bloquer à un moment donné par manque de rythme, un peu, car la fraîcheur physique retrouvée compensera, et de travail des automatismes en compétition, beaucoup, car c’est seulement en enchaînant les matchs qu’une équipe peut se construire techniquement.
Surtout ne rien changer :
Alors, bien sûr, avec la difficulté des Clermontois à remporter une finale, on devrait quand même assister à un match serré mais quand même. Le rugby français peut offrir de formidables spectacles aussi beaux dans l’intensité que dans la manière à l’image du Clermont – Toulon de la demi-finale. C’est même nécessaire pour se montrer attractif auprès d’un large public et continuer à se développer. Et c’est là où le bât blesse. Avec un calendrier qui ne tient pas compte des joueurs, non seulement il augmente le risque de blessures mais en plus il dénature le spectacle qu’il propose.
Que faire ? Oh, surtout rien c’est quand même là que les instances dirigeantes du rugby sont les meilleures. L’immobilisme, le statu-quo,… ces mots qui sonnent si bien à l’oreille des dirigeants aussi bien à l’IRB, à l’ERC, qu’à la LNR ou à la FFR. Mais vous allez me dire que, justement, le rugby français a réussi un formidable changement avec l’instauration des barrages qui permet de qualifier 6 clubs plutôt que 4. Nous n’aurez, alors, tort qu’en partie. D’abord, ce changement vient d’une pression du diffuseur Canal+ et non directement de la Ligue. Ensuite ce changement n’a rien modifié en termes de résultats sportifs comme l’a si bien souligné Guy Novès, ce sont les 4 premiers qui ont joué les demi-finales. Enfin, la lutte pour la 6ième place existait déjà par le passé et elle était d’une grande importance pour les clubs, puisque synonyme de qualification en HCup. Et elle était déjà passionnante sauf que moins médiatisée. Bravo, donc, à Canal + pour avoir mieux communiqué sur quelque chose qui existait déjà mais ce n’est pas d’habillage marketing que le rugby a besoin. Ou pas seulement.
Le rugby mondial a besoin d’un calendrier cohérent et de compétitions attractives donc nouvelles. Je ne reviens pas là-dessus pour l’avoir déjà exprimé dans cette chronique. Et j’ai dû être sacrément écouté puisque l’IRB vient de décider de revenir à un format de tournées avec matchs de province qui avait disparu depuis plus de 10 ans. Le rugby français, lui, a besoin de mieux protéger ses joueurs et ses équipes en les faisant jouer moins et mieux. Comment ? En prenant le problème par tous les bouts, il n’existe pas beaucoup de possibilités. En ce qui concerne la fin de saison démentielle où finales de HCup et de Top14 s’entremêlent trop dangereusement, il faut arriver à faire machine arrière et avancer la finale de HCup d’une bonne quinzaine de jours comme c’était le cas jusque-là. En ce qui concerne la qualité de jeu offerte aux spectateurs de plus en plus nombreux, que ce soit pour l’équipe de France ou pour les clubs, il n’y a pas d’autre solution que de réduire à 12 clubs l’élite du rugby français. C’est dommage pour les Albi, Montauban, Dax, Auch ou même La Rochelle mais entre le fait de déjà connaître l’équipe qui finira 14ième avant même le début de la compétition et la possibilité de hausser le niveau du rugby français et de, peut-être, se donner toutes les chances de devenir, enfin, champion du Monde, je crois qu’il n’y a pas photo…