Les femmes du Caire ou le rouge pourpre des coeurs

Publié le 24 mai 2010 par Audinette

 

Un film définitivement engagé, une esthétique symboliste parfaitement mise en place, une oeuvre marquante: ”Femmes du Caire”, le dernier film du réalisateur égyptien Yousry Nasrallah, est à voir à tout prix avant disparition de l’affiche.

Ca commence dans le luxe et la perfection apparente de deux journalistes egyptiens, Hebba et Karim. Mais quand le succès du talk-show politique d’Hebba menace la promotion tant attendue de son mari dans la presse d’Etat, elle doit s’effacer. Pour faire une émission qui parle de tout, sauf du gouvernement. Hebba se lance alors dans des portraits de femmes, sensés être plus ”divertissants”.

Ce sera au final et contre toute attente des portraits plus politiques que jamais, puisqu’ils sont la voix de la condition féminine en Egypte, du rapport de domination homme-femme, des histoires d’amour trahi, de pressions familiale, sociale, personnelle. Quelque soit la configuration du milieu social et le lien qui unit le couple, le rapport de destruction est là. La question du mariage est centrale: parce qu’elle montre l’inéquité des devoirs de la femme envers son époux; parce qu’elle met en exergue qu’il est un prétexte au sexe, dans l’honneur au yeux de la société mais toujours déshonorant dans l’intimité.   

Discours féministe? Oui, mais plus largement discours sur tout un rapport social à revoir. L’homme aussi a du mal a trouver sa place dans un cadre où il domine, mais parfois malgré lui, parfois suite à la manipulation de femmes ayant soif de prendre un pouvoir qu’on leur refuse, parfois enragé de perdre le contrôle sur une femme qui le devance.

“Tout est politique. La société est pourrie parce que la scène politique est pourrie”, le mari d’Hebba donne la clé d’un film qui parle de l’Egypte mais sur une question qui peut se poser presque partout ailleurs.

Au delà d’un message violent mais nécessaire, le film impressionne par une esthétique symboliste où le moindre détail vient appuyer le sens de chaque scène.

Il n’y a qu’un seul reproche à faire: la longueur de certains passages pour lesquels on pressent la chute bien avant qu’elle n’advienne.

Ceci mis à part, en une phrase: Yousry Nasrallah livre avec “Femmes du Caire” un film essentiel sur les coeurs saignants d’Egypte, et d’ailleurs.

Réalisé par Yousry Nasrallah
Avec Mona Zaki, Mahmoud Hemida, Hassan El Raddad
Durée : 02h15min

Voir aussi le billet de Chacha sur: http://artyficielles.wordpress.com/2010/05/24/bouleversantes-femmes-du-cair/