Les amis, il y a longtemps que je n’avais pas été aussi enthousiaste à propos d’un film. “Femmes du Caire” est tout simplement bouleversant. J’ai fini en larmes à essayer désespérément de gérer la chute du mascara soumis, comme tout corps existant, à la loi de la gravité pour éviter de sortir du ciné en panda géant.
Le film retrace l’histoire d’une présentatrice de télé égyptienne, animatrice non voilée d’un show politique qui n’hésite pas à poser les questions qui fâchent pour dénoncer la corruption du pays. On fait comprendre à son mari, beau gosse en passe d’être nommé rédacteur en chef d’un quotidien d’état, que sa promotion est conditionnée sur les ardeurs de sa femme. Celle-ci accepte donc, pour lui, de changer d’optique pour ses émissions et décide de raconter la trajectoire de femmes extraordinairement ordinaires.
Mais bien sûr, tout est politique et ces émissions sont l’occasion de continuer de dénoncer les torts de la société : la soumission de la femme, le port du voile, la pression sociale pour se marier…
C’est indéniablement un film féministe, qui clouera le bec à tous les cons qui estiment que la Journée de la femme est gadget, ou que c’est une sous St Valentin lors de laquelle il faut offrir des roses à ses collaboratrices. Mais ce n’est pas un film de filles : l’oeuvre questionne tout aussi bien la place de l’homme dans la société que celle de la femme, et au final, la question du politique.
Cela dit, les personnages féminins du film sont les plus travaillés. Les femmes du film sont toutes extraordinaires à leur façon, elles ont toutes le courage d’aller jusqu’au bout des choses, de résister à la pression sociale…L’héroïne, qui porte du Chanel et téléphone avec un iPhone, a un pied indéniable dans le “monde occidental”. Et pourtant un jour, elle prend le bus avec des femmes de la classe modeste, qui sont toutes voilées, et finit par mettre un voile pour qu’on lui foute la paix. Pour tout vous dire, ce sont des questions qu’on a vécu en Jordanie, notamment à Aqaba, la ville la plus au sud du pays, située sur les bords de la mer Rouge. On pensait naïvement que la ville étant la plus méridionale du pays, les femmes seraient plus légèrement vêtues. Que nenni. C’est même la ville où il y a proportionnellement le plus de femmes voilées. D’ailleurs, ce sont elles qui nous ont regardé avec le plus de mépris, nous, les poufs occidentales têtes nues.
Les paradoxes de la société égyptienne, et finalement ceux de la Jordanie, des pays arabes et voire même de la nôtre, sont habilement mis en jeu dans “Femmes du Cair”. Et quand on réalise qu’il a été réalisé par un homme, il ne reste qu’à dire “Chapeau l’artiste !”.
Infos pratiques
Titre original : Ehky ya schahrazad
Réalisé par Yousry Nasrallah
Avec Mona Zaki, Mahmoud Hemida, Hassan El Raddad
Durée : 02h15min
Distributeur : Pyramide Distribution