Guy Novès a donc réussi son pari : gagner un quatrième titre Européen, aux dépens du Biarritz Olympique.
Il régnait une drôle d'ambiance, hier soir aux Stade de France. Non pas que les supporters des deux équipes n'y aient pas mis du leur. Mais de voir une partie du public arborer des maillots irlandais, de regarder des publicités pour des assurances britanniques à la mi-temps et d'entendre le speaker proférer (mal) l'essentiel de son discours dans la langue de Shakespeare avait quelque chose de décalé. Et pour parachever le tout, la victoire finale du Stade Toulousain (21-19) ne fut pas fêté avec la ferveur à laquelle on pouvait légitimement s'attendre.
Sans doute le fait que cette finale fut franco-française retira à l'événement une partie de son sel. On peut aussi avancer que ce succès stadiste ne fut pas forcément acquis avec le brillant auquel le jeu toulousain nous a de longue date habitué. Mais l'essentiel est là, pour les supporters comme pour le coach rouge-et-noir : une quatrième étoile sera dorénavant brodée sur les maillots du club.
Ainsi cette 15ème édition, la troisième entre clubs tricolores, a encore une fois été remportée par Toulouse. Au passage, on constate que deux représentants français seulement ont à ce jour enlevé le titre Européen. Cette hégémonie Toulousaine n'est certes pas génante, mais on aimerait qu'un autre clubb puisse venir étoffer ce palmarès européen. A titre de comparaison, ce sont quatre équipes Anglaises et trois Irlandaises qui ont inscrit leur nom au bas de la Coupe.
Pour en revenir au match lui-même, on dira que Biarritz a plutôt joué comme on s'attendait à le voir de Toulouse, et que Toulouse a développé un jeu plus proche de la marque de fabrique biarrote que de la philosophie traditionnelle des rouge-et-noir.
Si Toulouse l'a emporté, c'est d'abord grâce à son cinq de devant. Conduit par un William Servat de gala ("man of de match", hier), le pack du stade a dominé son homologue, à l'exception du secteur de la touche. Au sein de ce pack quatre étoile,s Shawn Sowerby a également été excellent. Ce numéro huit est un Cigagna doté d'un turbo et d'un coup de pied incroyable.
Autre facteur de réussite, David Skréla, auteur d'une très bonne prestation, qui a "claqué" des drops au bon moment (sauf à l'entame du match...) et qui a su taper des chandelles pour profiter de la taille et de l'adresse de Yannick Jauzion face aux petits gabarits biarrots. De surcroît, le fils de son père a participé activement au dispositif défensif constitué par Guy Novès pour étouffer les velléités biarrotes.
Cinq plus huit plus dix ont donc fait quatre, pour la plus grande joie des supporters toulousains.
Et le soulagement serait-on tenté d'ajouter. Car à 21-12, alors que beaucoup pensaient le match plié et que le chambrage commençait à gagner les travées rouge-et-noir, un essai tout en vivacité de Karmichael Hunt à la 73ème minute redonnait l'espoir aux biarrots et un peu d'humilité aux supporters toulousains. Les sept dernières minutes furent les plus excitantes du match, Biarritz adoptant la tactique "tous les ballons à Takudzwa Ngwenya". Mais c'était un peu tard pour changer la donne.
Toulouse a su conduire son match comme il l'entendait et a parfaitement géré les incidents de jeu (l'expulsion - logique - de Patricio Albacete passa presque inaperçue). En face, après une entame prometteuse, Biarritz a eu deux périodes très faibles, en particulier en deuxième mi-temps, bafouillant son rugby. Le pack du BO fut étonnamment atone et ne pesa jamais sur le match. Derrière, on a bien senti combien l'absence de Damien Traille a desservi les hommes de Laurent Rodriguez et jean-Michel Gonzalez.
On ne pourra pas dire que Biarritz n'a pas tenté des choses, notamment en cherchant à franchir la ligne toulousaine par des passes "main - main" dans les intervalles. Mais Toulouse a fait bonne garde et exploité en contre plusieurs ballons qui auraient pu aller à dame sans de mauvais choix (Thierry Dusautoir) ou des ballons tombés (Maxime Médard).
Au final, la victoire Toulousaine, à défaut d'être brillante, fut somme toute logique. Le Stade règne en maitre sur l'Europe. Et Biarritz peut nourrir des regrets.