Naomi Watts est un peu une enfant du Festival de Cannes. C’est en effet ici que sa carrière a explosé, après la projection de l’excellentissime Mullholland drive du non moins excellentissime David Lynch. Menant une carrière aux choix assez éclectiques, elle est revenue cette année sur la Croisette avec deux films, un hors compétition – You will meet a tall dark stranger de Woody Allen, l’autre en compétition – Fair Game de Doug Liman, un nouveau film traitant du scandale des armes de destruction massive, juste quelques semaines après la sortie de Green zone, via l’histoire vraie de Valérie Plame Wilson, une ancienne employée de la CIA mise à l’écart parce qu’elle connaissait la vérité sur le pseudo-programme d’armement irakien.
A mon avis, la sélection de ce film en compétition officielle n’était sans doute motivée que par la nécessité d’avoir un représentant du cinéma américain dans le line-up, et par la perspective de voir la belle actrice australienne monter les marches au bras de Sean Penn, son partenaire dans le film.
Une montée qui n’aura finalement pas eu lieu, seule Naomi Watts étant présente à Cannes.
Le film n’est pas mauvais, mais ce n’est qu’une production hollywoodienne assez banale, qui enfonce des portes ouvertes pour nous, européens, qui avons toujours considéré l’argument des ADM comme un mauvais prétexte pour déclarer la guerre à l’Irak.
Les autres films en compétition aujourd’hui se sont révélé de bien meilleure facture.
Déjà, Route irish, le nouveau film de Ken Loach, qui s’intéresse aussi au bourbier irakien. Le cinéaste anglais a choisi la forme du thriller pour dénoncer l’attitude des soldats occidentaux contre le peuple irakien, et la façon avec laquelle l’armée britannique tente d’étouffer les exactions commises. Il dénonce la guerre en général, qui transforme les hommes, corrompt leur âme, et l’argent, qui est bien souvent la raison pour laquelle de jeunes britanniques acceptent de partir en Irak.
La maîtrise technique est au rendez-vous, mais ce n’est pas un Ken Loach d’exception, sans doute à cause du scénario “trop construit” de Paul Laverty. Mais là encore, un Ken Loach “mineur” surpasse bien d’autres films. C’est juste qu’on est très exigeant avec les grands cinéastes…
Ensuite, La nostra vita la belle chronique familiale et sociale de Daniele Luccheti, dans lequel un homme fraîchement veuf, tente d’oublier son chagrin en investissant temps, énergie et finances dans le chantier d’un immeuble. Une entreprise de (re)construction difficile… Et un film convaincant, même si on ne le voit pas prétendre aux principaux prix… Mais qui sait ? C’est le jury qui décide…
Cette journée marquait aussi la clôture de la Semaine de la Critique, avec la cérémonie de remise des prix et la projection de deux (très) courts-métrages, réalisés par des comédiens : Kirsten Dunst (Bastard) et James Franco (The clerk’s tale). Conscient de la difficulté d’accéder à cette projection, du fait de la priorité donnée à la presse professionnelle et des nombreux invités, j’ai préféré ne pas prendre le risque de faire la queue pour rien et de tenter…
… A Alegria, à la Quinzaine des réalisateurs. Un film brésilien que ses auteurs décrivent comme “ un mélange de Pedro Costa, Apichatpong Weerasethakul et de… John Hughes” et “ un film de super-héros”. Oups… Voilà qui va faire encore plus enrager mon collègue PaKa, resté à Paris, qui, comme chacun le sait, est fan des films de ce genre de films… Mais déjà, je calmerai son courroux en lui donnant l’autographe de son idole Tim Burton que j’ai fini par obtenir, et ensuite, je tiens à le rassurer tout de suite, il n’y avait pas de quoi se sentir frustré… Ce truc-là ressemble surtout à un film bricolé entre potes suite à une défonce aux drogues dures. Une bizarrerie audiovisuelle sans queue ni tête peuplée de monstres en plastiques, de fantômes et de lumières clignotantes.
Un film de super-héros, ça ? Vraiment ? Euuuh, finalement ce n’était pas si mal que ça Ghost rider…
Seul aspect du film à sauver, la jeune actrice principale, Taina Medina, très mignonne…
Autres films du jour dans cette Quinzaine un peu trop portée sur les films bizarroïdes jusqu’à l’excès : Picco de Philip Koch et Boxing gym de Frederick Wiseman. Je n’ai pas vu ces deux films, mais ils devaient faire partie de la veine plus épurée de la sélection…
A Un Certain Regard, projection de Simon Werner a disparu, premier film de Fabrice Gobert (pas vu non plus) et du nouveau film de Lodge Kerrigan, Rebecca H. (return to the dogs). Les échos de la première séance du matin étaient désastreux, mais j’ai quand même tenu à y aller. Et je n’ai pas regretté. Certes, le film est une expérimentation bizarre qui aurait eu sa place à la Quinzaine, et il ne s’y passe pas grand chose. C’est même très très lent à la fin et je comprends que l’on puisse détester. Pourtant, l’ensemble est assez envoûtant, belle mise en abîme sur le métier d’actrice et l’identification à un personnage, où tout repose sur la performance remarquable de Géraldine Pailhas, dont je suis, il est vrai, assez fan…
Et c’est après avoir échangé quelques mots avec la belle que je suis rentré me coucher, pour affronter en pleine forme le dernier week-end du festival. Il est des berceuses plus désagréables…