Avec tous les petits problèmes qui s’accumulent méchamment sur la République du Bisounoursland, la majorité présidentielle sait qu’elle va devoir affronter une opinion publique de plus en plus adverse. La voilà donc lancée, sous l’impulsion de son inénarrable agent d’assurances reconverti, dans une bataille électorale avant l’heure : il faut sauver les meubles et préparer 2012, puisque rien n’est plus important pour eux qu’une élection.
Quand Xav’ se lance dans le combat, ça cartonne.
Surtout question timing : on va lancer des papouilles et des mamours à ses électeurs alors que l’euro est au plus mal, la bourse fait des sautes d’humeur dignes d’un cyclothymique en phase aigüe, et que les petits copains du gouvernement tentent de rapiécer les retraites pour la n-ième fois, preuve s’il en était besoin que ce système efficace qui n’a besoin que d’une révision toutes les 18 mois devra encore tenir 24 mois de plus – autant qu’il n’explose que lorsque la gauche sera au pouvoir, en 2012.
En attendant, il va donc falloir séduire le chaland, et oser le déhanché aguicheur sur les rythmes chaloupés des podiums politiques.
Et c’est donc par l’Organe Officiel du Parti qu’on apprend que nos bateleurs de l’UMP reprennent du service.
Rien n’est laissé au hasard pour préparer l’élection dans deux ans : de mai 2010 à mai 2012, il ne se passera rien d’autre de plus significativement important, nécessitant de mobiliser les forces intellectuelles des élus de droite. Rien vous dis-je, l’affaire est close.
Et comme tout va bien, que le ciel est bleu et la situation limpide comme un lac de haute montagne, on peut donc se consacrer sans peine à des tâches proches du terrain : tutorat et stages pour l’un, accompagnement des cadres en recherche d’emploi pour l’autre, nouveaux modes de garde d’enfant pour un troisième, nos députés ont fort à faire pour explorer cette France qui trottine décontractée sur les sentiers de la vie normale et joyeuse d’un pays qui pète la forme.
Il faut toucher tout le monde. Toucher est d’ailleurs un mot faible, et tripoter serait plus proche de la réalité, comme le souligne Xavier :
«Le propos du Mouvement populaire, ce n’est pas seulement les classes populaires. Nous voulons nous adresser aussi bien au directeur du supermarché qu’à la caissière.»
Et je dois dire que ça va rapidement être carton plein : avec les actions menées actuellement dans la plus parfaite désorganisation par un gouvernement dont on cherche toujours la tête, on sait d’ores et déjà que chaque Français aura droit à sa petite attention touchante, très très touchante, de la part de tous les ministères, à commencer par Bercy.
En marge de ces délicatesses programmées, on sent les troupes d’élus UMP aussi très concernées par le bien être du cheptel de moutontribuables : ces derniers se plaignent, semble-t-il, que l’impôt, les bourses, les subventions, les aides, bref tout le système fiscalo-pompant par-ci et étatico-distributif par-là ne serait pas assez progressif. Il y aurait des effets de seuil. Si si. Je vous jure.
On comprend dès lors que Xav’ appelle de ses voeux un «système plus progressif» :
«Le problème, aujourd’hui, c’est que si l’on gagne un euro de trop, on n’a plus le droit à rien. J’en avais parlé avec Laurent Wauquiez en février et je lui ai demandé une note d’orientation sur la question.»
Nous sommes en 2010, et un parti vient de se rendre compte que des effets de seuil existent au sein des tubulures chromées de l’état jacobin.
Il était temps.
Puissance de la réflexion et théorème de la politique, dit du « ES => NO » : la présence d’un effet de seuil (ES) déclenche immanquablement la production d’une note d’orientation (NO). C’est pratique, une note d’orientation. Ça fait pro-actif, et ça aide à initier un réseautage à forte valeur ajoutée et développer par synergie des best-practices nécessaires pour conserver un parti en leadership. Puisque je vous le dis. Et si vous jouez au bullshit-bingo, vous devez avoir rempli votre grille ici.
Corollaire : tant qu’il y aura des effets de seuil, on saura occuper nos députés.
Et quand ce n’est pas des députés, ce sont des potiches cautions « Diversitude » secrétaires d’états qui seront mises à contributions. Là encore, on utilisera le système de note, par exemple sur le déclassement social pour Rama Yade, ou sur la développitude durable et la croissance verdiste, pour Chantal Jouanno.
Ils procèdent pas mal par note, à l’UMP, ne trouvez-vous pas ?
On imagine, bucolique, la floraison de petits post-its colorés dans les couloirs des lieux de réunions dorés des députés, ministres et autres secrétaires d’états, tous remplis de signes cabalistiques comme « Développitude verte » ou « Déclassement Social », avec des horaires de réunions, des numéros de téléphone pour un traiteur, un DJ ou animateur musical pour soirées costumées, que sais-je…
C’est formidable.
Et tellement en phase avec l’actualité.