Le narrateur, un écrivain autrichien, arrive aux Etats-Unis et y trouve une lettre de sa femme, qui y est également. Elle lui interdit de le revoir. Ensuite, voyage à travers le pays, perpétuel jeu de piste. Il lui court après, ou c'est elle qui lui court après. Ils se retrouvent enfin, pour se réconcilier et rompre.
L’errance du personnage rappelle un peu les road movies de Wenders, ses premiers films des années 70. Un homme se déplace sans vraiment avoir de but, recherchant quelque chose qui lui échappe, dans une quête de sens intrigante.
Une particularité technique de La courte lettre pour un long adieu contribue à cet effet d’étrangeté. Le livre est écrit à la première personne du singulier, mais en focalisation externe. Le narrateur nous dit ce qu'il fait, pas ce qu'il pense. Les seules choses qu'on connaît de ce qui passe dans sa tête, ce sont ses rêves nocturnes.
On peut les interpréter, comme on peut interpréter les comportements des personnages. Handke semble en effet nous dire: l'attention que moi, auteur, je porte sur tel ou tel geste un peu singulier, montre bien qu'il faut les déchiffrer; c'est à toi, lecteur, de reconstituer ce qui n'est pas là, et ce qui est important, transcendant presque.
L’impression générale est qu'on se retrouve un peu comme dans ces livres de mystique, vous savez, où de grands sages décrivent des choses insignifiantes, et donnent l’impression que derrière, il y a du sens, une profondeur, un message qui semble s’offrir, proche, atteignable, un message qu’il suffirait de décrypter, mais il échappe toujours un peu.
Peter Handke, La courte lettre pour un long adieu, Folio