La douleur chez les hommes... Et chez les femmes...

Publié le 19 mai 2010 par Yann Frat / Un Infirmier Dans La Ville

Alors non je n'ai toujours pas peur et oui je vais encore rallumer la guerre des sexes car au fond je suis un pur provocateur... ;)
Bon bref donc aujourd'hui: La douleur chez les hommes... et chez les femmes...

Parce que oui tout le monde (enfin sauf les sourds qui sont bien heureux sans le savoir;)) ) a entendu ce refrain " les hommes c'est douillet alors que les femmes ça se plaint moins parce que ça a l'habitude de la douleur, non mais..."

Certes et je ne conteste pas... Sauf que dans l'exercice quotidien mesdames vous êtes un poil casse pied a vouloir prouver à tout prix (à qui d'ailleurs?) que non vous vous résistez à la douleur genre "Ah ah moi j'ai accouché de trois gosse et sans péridurale alors...". Alors, alors... Alors quoi?

Bref, je replace le contexte : Avant d'être en libéral, jeune infirmier beau et frais (oui ok surtout frais en fait... ;)) ) je bossais dans une clinique en chirurgie orthopédique. Or, en orthopédie, on fait souvent des "bloc anesthésistes" c'est à dire qu'à la sortie de l'intervention on anesthésie le membre opéré pendant 8 à 12 heures pour éviter la douleur... Ce qui est d'ailleurs une très bonne chose... (car non, qu'on se le dise, la douleur n'est pas thérapeutique, elle ne sert à rien sinon à faire mal...). Donc mon rôle à moi c'était de commencer l'antalgie en perfusion dés que le bloc commençait à ne plus faire effet...

Et j'avais donc pour ça tout une gamme thérapeutique du simple paracétamol... à la morphine.

Bon, c'est clair pour tout le monde ? Pas de questions? Alors on continue...

Donc, en ce temps là, vers 18 heures je faisais mon tour du soir (le dernier avant de partir) et en général c'est là que les blocs se réveillaient... Et là ça ne coupait pas (à 80% du temps) :

Quand le patient était un homme (genre un sportif, genre un rugbyman car c'étaient les grands habitués de mon service) :
"-Vous avez mal?
- Mal non mais ça commence à me picoter un peu, rien de grave mais c'est désagréable..."
Donc ok bingo on lançait le protocole gradué et en général le gars passait une bonne nuit...

Mais quand le patient était une femme (genre la cinquantaine...) evidemment:
"- Vous avez mal?
-  Moi? Mal? Pffff n'importe quoi oui... Les gens sont vraiment devenu des chochottes, PAS DU TOUT, JE N'AI ABSOLUMENT PAS MAL... Et puis ah ah, je peux vous dire j'ai fait trois accouchements sans péridurale alors hein moi la douleur je sais ce que c'est alors donc je peux vous le dire non, je n'ai pas mal !!!!
- Ok vous êtes sure?
- Pfff mais plus que sûre, gardez vos drogues pour les chochottes de rugbymen de votre service, nous les vraies femmes on sait supporter la douleur...
-Ok..."

Et donc, là aussi, re bingo, en général j'avais à peine fini ma tournée et rangé mon chariot que :

DRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIg!!!!
DRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIgggg!!!!! DRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIng!!!! DRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIng!

Madame trois accouchements s'excitait sur la sonnette, et là dans la chambre :

"-AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAh donnez moi vite quelque chose je n'en peuuuuuut pluuuuuus !!! J'ai maaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaal , j'ai maaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaal, j'ai essayé de supporter mais là c'est plus possible!!!! J'ai MMMMMMMMMMMMMMMAAAAAAAAAAAAAAAALLLLLLLLLLLLL!!!"
...
...
Dans la foulée je commençais donc le protocole en retard qui ne servait à rien...
Sauf à énerver madame trois accouchements.

"MAIS c'est nuuuuuuuuuuuuuuul votre truc j'ai maaaaalllllllllllllllllllll"

Donc on passait à la morphine...
Donc aux vomissements (car oui la morphine fait vomir, sachez le)
Donc à une nuit de merde entre "driiin driiing" et "j'ai maaaaaaaaalllllll..." et "roooh j'ai vomi..."

Pouic pouic pouic.... Pouic pouic pouic.

A la fin, plus aguerri , quand je repérai d'entrée une "trois accouchements" en fait je mettais le paracétamol d'office à 18 h (mais c'est quoi que vous me mettez là ? Du sucre madame, du sucre....) ou bien je préparais à l'avance le paracétamol et la morphine avec le nom de la patiente dessus... Et au premier couop de sonnette : "Laisse ginette j'y vais, c'est la 306, je vois le problème..."
...
...

Alors bon mesdames, je ne voudrais pas tomber dans la caricature facile mais pour une fois  j'ai une seule question qui me taraude depuis des années, une seule et simple question:

MAIS POURQUOI?????

;))))